Une série d’abandons et une quête généalogique, par Stéphanie Guillot

La petite histoire de nos ancêtres

Une série d’abandons et une quête généalogique, par Stéphanie Guillot

Au départ, une femme mystérieuse que l’on dit gitane (son physique et ceux de ces enfants sont très « typés ») : Anne Marie WEDLY. Son nom est peu commun pour la région Ile de France ce qui contribue au mystère. L’histoire qu’elle a raconté à sa famille est la suivante : elle a été mariée en première noce avec un allemand et à eu un fils, tous les 2 morts pendant la guerre.

Mon point de départ a été son acte de mariage en 1889 à Soindres (78) avec mon ancêtre François Joseph HENRY. On sait alors qu’elle est née à St Ulrich (68) en 1854, qu’elle est cuisinière et vit à Dijon (21) en 1889, que sa mère, Catherine WEDLY vit à Altkirch (68) et est agée de 61 ans et qu’Anne Marie est veuve de Célestin BLONDE (date de décès et lieu non précisés).

La première découverte et la première surprise a été celle de la famille BLONDE. Anne Marie s’est mariée à l’âge de 22 ans avec Célestin en 1876 à Grandvillars (90), il n’a alors que 17 ans. Ils ont un fils, Ortense BLONDE né en 1880 à Porrentruy (Suisse). Que se passe-t-il après le décès de son époux en 1883 ? Que devient Ortense ? En 1902, il se marie à Caspach (68).

On retrouve Anne Marie à Dijon où d’autres surprises nous attendent. Anne Marie va accoucher une première fois en février 1887 à Dijon d’un fils nommé Jules qu’elle reconnait par un acte en avril 1887. Pourquoi puisqu’elle est déjà citée dans l’acte de naissance ? Que fait-elle de Jules ? Ce dernier restera à Dijon où il se mariera en 1912.

Anne Marie va accoucher une seconde fois en novembre 1888 à Dijon d’une fille nommée Jeanne. Cette dernière devient une « enfant assistée du département de la Côte d’Or » et se mariera en 1912.

Puis en août 1889 Anne Marie se marie à Soindres. Il semble qu’elle soit partie de Dijon tout de suite après son accouchement.

Qu’est devenue Anne Marie entre 1883 à Porrentruy et 1887 à Dijon ? Elle n’est pas dans le recensement de 1886 à Dijon à l’adresse de son accouchement l’année d’après. A-t-elle eu d’autres enfants ? C’est fort possible.

Avec son second époux, François Joseph HENRY, elle a eu 3 enfants. Jeanne Albertine, mon arrière-grand-mère née en 1890, Marie Ange (1892) et Albert (1896). Est-ce que François Joseph connaissait l’existence des autres enfants ? Qu’est ce qu’il savait de sa femme ? Les enfants eux, n’avaient qu’une version, celle des BLONDE morts trop tôt.

Quant à la mère d’Anne Marie, Catherine WEDLY, elle avait 26 ans lorsque sa fille est née. Elle vivait alors chez Jean RICHARD, domestique huilier à Saint Ulrich. Ce Jean était marié à une Marie Anne WETTLY décédée à l’âge de 35 ans en 1854, mère d’un enfant né hors mariage. Il est également témoin de la naissance d’un autre WETTLY né en 1854, sa mère s’appelant Marie Anne elle aussi. Quel est le lien entre ces 3 femmes en dehors de ce Jean Richard ? Elles ont toutes eu des enfants naturels, était-il le père ? ou simplement un brave homme les ayant recueillies ?

Les enfants naturels sont nombreux dans cette lignée : Catherine WEDLY (peut-être pas la première) à une fille Anne Marie WEDLY qui a 2 enfants naturels, sa fille Jeanne Albertine HENRY, a eu un premier enfant que son époux a reconnu lors de son mariage, il avait un an. L’une de ses filles, ma grand-mère, a eu 1 enfant hors mariage. Et l’une de ses filles, ma mère, a eu un enfant naturel. A priori, ça va s’arrêter là…

Cette histoire retrace probablement la vie de beaucoup de jeunes femmes à cette époque. Mais je n’arrive pas à comprendre les abandons. Quelle tristesse pour ces enfants. Et elle, était-elle heureuse dans sa nouvelle vie ?

C’est la plus vieille photo que je possède.

Il s’agit à gauche de Jeanne Albertine HENRY et son mari Louis Martin FISCHER mariés à Mantes (78) en 1910. Sur ses genoux, ma grand-mère, Suzanne, à côté l’ainé Georges (fils ou non de Louis ?) et Alice. Il y a eu 3 autres enfants par la suite.

Cette photo est donc datée de 1922 à priori (ma grand-mère est née en 1920). Au dos de la photo, très épaisse, c’est une carte postale et je suis incapable de lire ce qu’il y a au milieu.

Ils n’ont vraiment pas l’air de s’amuser sur cette photo et Jeanne a un regard dur au contraire de son mari, plus doux.

Il semble qu’elle savait être effectivement très dur, voire violente selon ma grand-mère. Sa vie a été difficile. Elle était domestique lorsqu’elle a eu son premier fils et il semblerait que son géniteur ait été le fils du patron (?). Elle s’est mariée à Louis, menuisier, qui ne roulait pas sur l’or. Ils ont eu 6 enfants dans une petite maison que j’ai eu la chance de connaitre (1 cuisine, 1 salon, 2 chambres, 1 cour de 10 m2, 1 WC au fond de la cour, 1 puits). L’un de ses fils a été atteint de turberculose à l’âge de 20 ans et est parti vivre dans la Sartre, un autre est mort à la guerre, il avait 18 ans. Sa fille ainée est partie vivre en Indochine, son frère dans le Limousin. Quant à ma grand-mère, elle s’est mariée dès l’âge de 21 ans « pour s’enfuir » et est partie à Paris pour divorcer 5 ans plus tard avec 3 enfants. L’ainée a été « enlevée » par sa belle-mère, ma mère est restée avec elle et son fils, bébé, est allé vivre chez Jeanne et Louis. Dix ans plus tard, ma grand-mère a eu son 4e enfant, seule. Georges, le fils ainé de Jeanne est le seul à être resté jusqu’au bout à côté d’elle, il vivait à 4 maisons de chez elle. Elle avait 78 ans lorsque je suis née et son époux venait de décéder. Elle était très pieuse et je l’ai toujours connue très gentille. Elle est décédée à l’âge de 98 ans, ravie de « rejoindre » les siens.

 

By René Arbour

Management certificate of Credit Card (New York - 1983-84) Bac Administration , Security for the people (Minesota 1984)