Barras, L’ex-voto disparu et le vaisseau fantôme

Barras, L’ex-voto disparu et le vaisseau fantôme

 jeudi 25 octobre 2012, par Philippe de Ladebat

Aux pieds du vieux village de Fox-Amphoux dans le Var, le promeneur pouvait contempler jadis dans une chapelle creusée dans la falaise un ex-voto peint représentant un vaisseau en péril luttant contre la tempête ; une vierge à l’enfant dans les nuages semblait entendre l’appel d’un officier d’artillerie en uniforme bleu représenté au coin gauche du tableau.

, puis transporté au début du XXe siècle dans l’église même du village où il a été volé en 1998.
La jeunesse de Barras est peu connue et le voir ainsi associé à une œuvre pieuse évoquant une fortune de mer attise la curiosité.

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L’ex-voto reconstitué d’après une carte postale

Pour mémoire : une jeunesse provençale

Ne redoutant jamais de faire parler les morts Google indique : « Pour communiquer avec Paul Barras, vous devez d’abord vous inscrire à Facebook. Il est inhumé au cimetière du Père Lachaise.  » Sur sa page Facebook notre homme n’a pourtant aucun ami et sa pauvre tombe non entretenue du cimetière du Père La Chaise à Paris ne porte que la simple inscription :

PAUL BARRAS / MEMBRE DU DIRECTOIRE EXECUTIF / NÉ Á FOS AMPHOUX DEP DU VAR / LE 30 JUIN 1755 / MORT À PARIS LE 29 JANVIER 1829

Pour la grande histoire le rôle de Barras commence en 1792 à la Convention, s’affirme le 9 thermidor et s’épanouit au Directoire ; le Directeur ne quittera définitivement la scène politique que le 9 novembre 1799 (18 Brumaire An VIII).
Le vieil homme qui va s’éteindre à Paris par un sombre jour de janvier 1829 était né dans le soleil du Var, en juin 1755. Qu’avait-il fait avant son entrée dans l’Histoire ?

Sur la place de l’église de Fox-Amphoux l’un des plus vieux micocouliers de France, planté en 1550, se dresse encore aujourd’hui avec ses 18 m de haut et ses 5m de circonférence. Il a survécu à la fureur révolutionnaire qui associait les micocouliers au clergé et les abattait ; il aurait été sauvé in extremis au motif que le citoyen Barras était natif du lieu. L’arbre avait déjà plus de 200 ans lorsque le jeune Paul Barras grimpait sur ses branches avec les garnements du village ou suçait en octobre la pulpe sucrée de ses micocoules violettes à gros noyaux.

Non loin de là, sur une plaque de pierre au mur de sa maison natale on lit :

« Ici naquit le 4-6-1755 Ct PAUL de BARRAS Conventionnel du VAR Directeur de la République »

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Paul François Jean Nicolas vicomte de Barras est issu de la noblesse provençale. Son père est un officier supérieur, un Barras « aussi ancien que les rochers de la Provence » disait-on ; sa mère Élisabeth Pourcelly, est une petite fille de la marquise de Castellane-Montpezat. Ils possèdent en tout et pour tout une maison dans le village et quelques terres dans la plaine.
Le jeune Barras aura pour premiers horizons les hautes terres varoises, pour amis les jeunes hobereaux du voisinage dont le Duc de Blacas d’Aups mais aussi, beaucoup plus nombreux, les enfants des fermiers et des artisans locaux. De quoi ouvrir l’esprit sans contraintes et former un caractère autonome. Un rapide passage en pensionnat et quelques leçons d’un précepteur occasionnel lui donnent quelques bases d’éducation mais il refuse d’être page du Duc d’Orléans et choisit la carrière militaire.

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Le vicomte Paul de Barras à 16 ans

Après quelques exploits amoureux – déjà -, il entre comme cadet au régiment de Languedoc et suit une formation militaire. À vingt-et-un ans il a hâte de voyager et s’enrôle comme sous-lieutenant au régiment de Pondichéry. Le 30 juin 1776 il s’embarque à Marseille pour les Indes sur le vaisseau Duc de Duras.

Comme officier d’infanterie, il va participer notamment aux campagne des Indes contre les Anglais (escadre Bellecombe puis escadre Suffren) et faire à deux reprises la traversée de France à Pondichéry. C’est au cours de l’un de ces voyages que prit dans une tempête il se serait recommandé à la Vierge en lui promettant un ex-voto de reconnaissance s’il échappait à la mort. De retour en France en 1783 il aurait exécuté son vœu. Un ex-voto a bien été déposé dans la chapelle du Bon Secours, puis transporté dans l’église même de Fox-Amphoux où il a été volé en 1998. Il n’en reste plus qu’une trace photographique sous forme d’une carte postale.

Ce pèlerinage a-t-il bien eut lieu ? En mémoire d’un naufrage évité sur quel vaisseau ?

Le pèlerinage de Barras à la chapelle du Bon Secours de Fox-Amphoux : une belle légende provençale ?

En ce dimanche de 1783 toute la population du village de Fox-Amphoux est rassemblée devant l’église Notre Dame de L’Assomption. On est même venus des villages voisins car les curés de Barjols, Aups, Cotignac, Salernes… ont répandu la nouvelle dans leurs sermons et le bouche à oreille a fait le reste. Les premiers arrivés se pressent dans l’ombre fraîche du grand micocoulier planté au milieu de la place. Des hirondelles raient le ciel bleu et des choucas nichés haut dans les branches crient leurs tchia tchia en volant vers le clocher. Tout le village est en émoi.

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On bavarde, on commente, on s’informe : le jeune seigneur de Barras est à la messe et doit bientôt sortir pour aller faire son vœu à Notre Dame de Bon Secours. Les plus renseignés racontent à leur façon comment le jeune capitaine a échappé par miracle à une violente tempête alors qu’il allait guerroyer aux Indes contre l’ennemi anglais. On est en Provence et chacun d’ajouter sans vergogne les détails les plus dramatiques de l’évènement.

Dans le clocher carré à campanile les deux cloches sonnent maintenant l’Angélus et le portail de l’église s’ouvre : le jeune vicomte de Barras apparait dans son bel uniforme d’officier d’infanterie. Grand, svelte, le visage bronzé, il descend maintenant les marches du perron. Le visage grave, recueilli, pieds nus comme il convient pour un pèlerin, il chemine lentement, un cierge allumé à la main, à côté de sa mère et suivi de son frère cadet.

Comme il prend la rue qui passe devant sa maison natale il s’incline et la foule le suit en cortège sur la calade qui descend en forte pente avec de nombreux lacets, dans l’ombre d’une forêt de chênes verts. La foule se met en file pour suivre l’étroit sentier empierré derrière Barras et ses proches. Le jeune homme, silencieux, parait insensible aux cailloux qui roulent sous ses pieds nus. Après une trentaine de minutes de cette marche lente, une grotte-chapelle s’ouvre à droite dans la haute falaise de tuf calcaire couverte de mousse.

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Dans la chapelle que l’on nomme ici Notre Dame du Bon Secours, Barras agenouillé dit sa reconnaissance pour la Vierge qui l’a sauvé des flots et reçoit la communion du curé du village. Ensuite, son frère cadet qui portait un tableau ex-voto, le suspend au mur de droite de la chapelle.
Réalisé par un peintre de Marseille, le tableau représente un navire battu par les flots ; en bas à gauche un personnage en uniforme d’officier, la main sur le cœur, regarde vers le ciel où apparait Notre Dame de Bon Secours, portant l’enfant Jésus.

Barras, sorti, s’aligne avec sa mère et son frère le long du chemin, tandis que la foule des villageois pénètre en file indienne dans la chapelle pour admirer l’ex voto ; chacun y va, bien sûr de son commentaire élogieux sur le courage et la piété de l’enfant du pays…

« Se non e vero è bene trovato ». On trouve ce genre de récit plus ou moins romancé dans des commentaires « d’érudits locaux » sur Barras au début du XXe siècle ; ces textes ne citent cependant aucune source et s’abritent derrière la formule « selon la légende » [1].

Quant à Barras, il se garde bien de raconter dans ses mémoires, cet épisode mystique et religieux, peu compatible avec ses opinions révolutionnaires anticléricales et sa politique de déchristianisation sous le Directoire ; quant aux historiens et biographes de Barras ils n’évoquent qu’avec beaucoup de réserves ce prétendu pèlerinage. Jean Savant parle de la vie de Barras comme d’une « fosse aux légendes ».

Nos « spin doctors » contemporains et autres experts en « story telling » spécialistes de la « communication narrative » n’auraient cependant pas fait mieux pour mettre en scène le fameux ex-voto et susciter l’émotion populaire pour faire passer un message édifiant.
Le message subliminal de l’histoire pourrait être : Voyez bonnes gens quand on remet son sort pieusement à Dieu il nous sauve des plus dangereux périls et il convient de l’en remercier par une action de grâce… À supposer que cette histoire de pèlerinage ait été totalement ou partiellement inventée, à qui profiterait-elle sinon à quelque brave curé ou fervent catholique s’essayant à la pratique de la parabole pédagogique ? Nous sommes alors très loin des préoccupations de Barras…

Quoiqu’il en soit il existait bien un ex-voto aujourd’hui disparu…

L’ex voto volé dans l’église

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Carte postale originale en couleurs

Cette peinture sur toile encadrée a été classée au titre « d’objet monument historique » le 30 octobre 1914. Déposée dans l’église Notre-Dame de l’Assomption, comme propriété de la commune de Fox-Amphoux, elle est signalée aujourd’hui dans la base Palissy comme « œuvre volée ». On en possède plus qu’une image sur une carte postale noir et blanc et deux autres images plus petites sur deux autres cartes postales dont une en couleur. Les deux cartes postales en N&B, numérisées, sont consultables sur le site des Archives Départementales du Var à Draguignan.

Cet ex-voto n’est pas signé comme la plupart des œuvres des peintres d’ex-voto et à la différence des œuvres de peintres qui ne peignaient pas que des ex-voto (Voir Les portraits de navires dans les ex-voto marins peints de Notre-Dame de la Garde à Marseille et Les Roux de Marseille : une dynastie de peintres de marines). Il est de dimension modeste : h = 25 cm et l = 33, soit un peu plus grand que notre format A4 contemporain.

Sa composition, conforme aux usages antérieurs à la Révolution, présente trois espaces juxtaposés et en relations symboliques. L’espace céleste, en haut à gauche, est occupé par la Vierge avec son enfant représentés dans des nuées ; en-dessous en bas à gauche un personnage debout en jaquette ou uniforme d’officier, en posture d’orant le bras gauche ployé sur sa poitrine, et dont on imagine ici qu’il s’agirait de Paul Barras ; enfin la scène marine sur les 2/3 restant à droite et en bas de la surface du tableau représente un navire trois mâts dans une mer déchainée, trois voiles gonflées par le vent semblant porté irrémédiablement vers un rivage très proche. En la circonstance il pourrait s’agir soit d’un moment précédent un naufrage dont l’orant serait sorti indemne grâce à l’intercession de la vierge, soit d’un navire épargné par la tempête pour la même raison.

Enfin dans le coin supérieur droit est inscrit en noir :

L’actif
EX VOTO
1783

On peut lire aujourd’hui sur la carte postale déjà citée :

Le Conventionnel et Directeur Barras naquit le 30 juin 1755 à Fox-Amphoux (Var). Officier de marine, il se rendit dans les Indes ; lorsque le vaisseau sur lequel il était monté, l’Actif, fit naufrage vers les îles Maldives. Au gros du danger il se recommanda à la vierge de N. D. de Bon Secours de Fox. À son retour, en 1783, il se rendit, d’après la tradition, nus pieds et accompagné de sa mère, au sanctuaire vénéré de la vierge, il y communia et offrit cet ex-voto qu’on y voit encore.

Si ce texte évoque lui aussi « d’après la tradition » un pèlerinage de Barras et qualifie Barras d’officier de marine alors qu’il est officier d’artillerie, il se réfère surtout à l’évènement qui a suscité la réalisation de l’ex-voto : le naufrage vers les île Maldives du vaisseau L’Actif sur lequel Barras aurait été embarqué. Le problème est que l’on ne trouve pas trace, non plus, d’un tel vaisseau.

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Enquête sur un vaisseau fantôme

Si l’on recense les différents voyages de Barras sur les routes des Indes, on trouve qu’il s’embarque d’abord à Marseille le 30 juin 1776 sur le vaisseau Duc de Duras pour rallier Pondichéry. Ce vaisseau fait naufrage le 12 avril 1777 au large des Maldives. Barras repart des Maldives le 15 mai 1777 sur le vaisseau La Bretagne qui arrive le 24 mai 1777 à Pondichéry. Après la reddition de la ville aux Anglais le 18 octobre 1788, Barras revient en France sur Le Sartine (Voir article H&G sur ce vaisseau N° 1148). Débarqué à Marseille le 20 mai 1780, Barras va séjourner de fin mai à février 1781 à Fox-Amphoux.
En mars 1781 Barras doit rejoindre le régiment de Pondichéry à Lorient où il embarque le 16 mars 1781 sur le Maurepas puis, après une escale au Cap, il monte sur l’Artésien (Escadre Suffren). Le 18 avril 1781 il participe au combat naval de La Praya (Iles du Cap vert) puis rejoint Le Cap sur le Maurepas. Il séjourne au Cap jusqu’à fin aout 1783 où il s’embarque sur la Julie Bien-Aimée pour Marseille où il débarque en novembre 1783. Il donne alors sa démission de l’armée et va s’installer à Paris deux mois plus tard. Mais ceci est une autre histoire…

Comme on le voit, on ne trouve pas trace dans les pérégrinations navales de Barras d’un passage sur un vaisseau nommé L’Actif. Les différents états de la marine Royale et les recensements de navires de commerce ne révèlent pas non plus la présence d’un navire de ce nom sur les routes maritimes des Indes entre 1776 et 1783 [2].

Si Barras sur un vaisseau nommé L’Actif avait effectivement affronté une très violente tempête on ne voit pas pourquoi il n’en parlerait pas dans ses mémoires alors qu’il raconte avec force détails les péripéties du naufrage du vaisseau le Duc de Duras qui le transportait lors de son premier voyage vers Pondichéry. Le fait est cette fois attesté, en outre, par le commandant de ce vaisseau qui le raconte, au 12 avril 1777, sur son journal de bord, repris dans l’Histoire des naufrages de Deperthes.

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Histoire des naufrages, 3 T, Deperthes, 1789.

Dans ses « Mémoires » [3] Barras relate le naufrage du vaisseau le Duc de Duras sur lequel il s’était embarqué à Marseille le 30 juin 1776 pour rejoindre son régiment à Pondichéry :

« Nous naviguions par un beau temps, lorsque, au milieu de la nuit, un violent ouragan survînt tout à coup. Notre vaisseau donna contre un banc de sable ; la quille fut brisée et nous échouâmes. Chacun se rendit à la hâte sur le pont : nous étions tous à demi-nus et dans la consternation ; à la vue du commun danger, nous prenions en tumulte des résolutions à l’instant même abandonnées. Nous n’avions plus de mâts ; d’épaisses ténèbres nous environnaient, et nous ne savions que résoudre.

Le capitaine était embrassé par son frère qui se recommandait tout haut à Notre-Dame de la Garde. De toutes parts on adressait des prières à la « Bonne Mère »… Notre position était affreuse. Naufragés sur des rochers que la mer agitée couvrait de ses vagues, nous fûmes heureux de trouver un refuge sur le banc de sable qui nous avait fait échouer et qui était situé à deux encablures du vaisseau, presque entièrement détruit…Peu d’instants après, le vaisseau, qui faisait eau de tous côtés, disparut ».

Ce naufrage est attesté par la relation qu’en a faite en outre le Commandant du vaisseau, le Capitaine Pierre Blancard [4].

Accessoirement ce capitaine marseillais (1741 – 1826) est resté célèbre pour avoir été le premier à importer en France des boutures de chrysanthèmes. Toujours est-il qu’il raconte en détail le naufrage du Duc de Duras le 12 avril 1777 en notant sans commentaire la présence à bord de Paul Barras.

« Quelque sombre que fût la nuit du 11 au 12 avril, aucun indice, aucune présomption ne faisaient craindre de rencontrer la terre ; chacun se livrait aux douceurs du repos, qu’une nuit plus fraîche rendait plus facile, lorsque vers les deux Heures du matin, l’officier chargé de veiller à la manœuvre du vaisseau, croit apercevoir quelque chose de blanc. Il crie au timonier de changer la route, mais il n’est plus temps ; la profondeur manque et le vaisseau échoue avec une force à sa vitesse.
Tout le monde s’éveille avec terreur, la nuit semble s’être obscurcie, en vain les yeux cherchent à percer les ténèbres qui environnent le vaisseau. On ne sait encore si les écueils sur lesquels il talonne de la manière la plus effrayante, sont isolés au milieu de la mer, ou s’ils tiennent à quelque terre ; enfin, au bout d’une demi-heure , on aperçoit un feu sur une petite île. Cette vue, au milieu des horreurs d’un danger aussi pressant, fait luire un rayon d’espérance dans les cœurs, et on s’occupe des moyens d’échapper au naufrage.
Le mât d’artimon tombe sous les coups de bâche, et après avoir mis à la mer la chaloupe et le canot, on travaille à décharger le vaisseau du fardeau inutile de ses autres mâts, qu’on n’abat qu’avec peine. Les lames, qui viennent avec fureur frapper contre le vaisseau, le soulèvent pour le laisser retomber sur les rochers, où l’on craint à chaque instant de le voir s’entr’ouvrir.
 » etc.

En conclusion provisoire Barras a certainement vécu le « vrai » naufrage du Duc de Duras lors de son premier voyage à Pondichéry. Sans doute, comme c’était l’usage à l’époque sur un vaisseau de Marseille, a-t-on alors demandé à bord le secours de la Bonne Mère. Le jeune Barras se serait peut-être joint à ces prières et à ces vœux, bien qu’il ne le mentionne évidemment pas dans ses mémoires écrites beaucoup plus tard alors que ses convictions religieuses avaient évolué.
A-t-il à son retour fait réaliser un ex-voto qu’il serait allé déposer en pèlerinage dans la chapelle du Bon Secours de Fox-Amphoux ? Pourquoi alors faire inscrire le nom d’un vaisseau sur lequel il n’aurait pas été embarqué ?
Il nous faut admettre que nous butons toujours sur cette énigme que nous livrons à la sagacité des lecteurs.

 

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« La fable est la sœur ainée de l’histoire  » écrivait Voltaire. Avec sa vie accidentée et quelque peu romancée à son avantage dans ses mémoires, le personnage de Paul Barras se prête aux anecdotes et aux légendes. On a tenté ici de montrer que l’épisode qui sert de sujet à l’ex voto volé de Fox Amphoux relève plus du conte provençal et de l’imagerie populaire que du fait historique avéré. La disparition de l’ex voto dans des conditions que nous n’avons pas pu élucider ajoute, bien à propos, un voile de mystère sur des vœux à la Vierge ainsi qu’un prétendu pèlerinage que Paul Barras aurait faits. Ses actions révolutionnaires et anticléricales futures ne plaident pas en faveur de son éventuelle piété de jeunesse mais rappelons à sa décharge le précepte danois : « Pour apprendre à prier, va sur la mer ; pour apprendre à dormir, va à l’église  ».

Quoiqu’il en soit une promenade au village de Fox Amphoux où l’on voit toujours la maison natale de Paul Barras et une visite de la chapelle du Bon Secours où ne subsiste qu’un agrandissement de la carte postale du fameux ex voto permettent de mieux comprendre un personnage décrié pendant le Consulat et l’Empire, mal aimé par la postérité Républicaine, mais auquel Madame de Stael disait pourtant un jour évoquant Robespierre et Fouché :
« Ah ! Je n’aime pas ces hommes glacés aux cœurs de citrouilles fricassés dans la neige. Vous, cher Barras, qui n’êtes point glacé, vous avez une âme de Provence, comme je les aime… ».

Nul doute qu’un tel personnage ne pouvait qu’embrasser avec enthousiasme les promesses de libertés qu’annonçait la Révolution et son tempérament provençal fera qu’aucun de ses jours ne sera désormais banal.

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L’humble tombe de Barras au Père La Chaise

Bibliographie sur Barras :

- « Quand Barras était roi », Alfred Marquet, Émile-Paul éditeur, 1911.
- « Barras et son temps », Henri d’Alméras, Albin Michel, 1930.
- « Barras ou le jeu corrupteur de la politique et de l’amour », Jean Bréhat, Baudinière, 1935.
- « Barras, le ‘Roi’ de la République, 1755-1829 », Jacques Vivent, Hachette, 1938.
- « Tel fut Barras, l’homme qui inventa Bonaparte », Jean Savant, Fasquelle, 1955 (N.B. cet ouvrage d’un historien reconnu est le mieux documenté et ‘sourcé’ ).
- « Barras, le roi du Directoire », Jean-Paul Garnier, Perrin, 1970.
- « Barras, le Vicomte rouge », Eric Le Nahour, Lattès, 1982.
- « Barras », Pierre Temin, Rousseau-Genève, 1992.

By René Arbour

Management certificate of Credit Card (New York - 1983-84) Bac Administration , Security for the people (Minesota 1984)