Les filles de La Rochelle

Les filles de La Rochelle

Lundi 6 décembre 2010

Ce sont les filles de La Rochelle

Qu’ont armé un bâtiment (bis)

Pour aller faire la course

Aux Echelles du levant

La musique http://www.chansonsdemarins.com/Larochelle/M110.htm

ou bien

http://www.dailymotion.com/video/x2lrow_dorothee-les-filles-de-la-rochelle_music

Cette chanson, maintes fois remodelée  au fil du temps selon les lieux,  aurait été inspirée au départ par les filles du roi qui sont passées par le couvent de la Providence à La Rochelle pour venir peupler la Nouvelle-France. Faire la course aux échelles du levant était une expression utilisée à l’époque par les jeunes filles apprenties lorsqu’elles allaient travailler chez les maîtres.

Ces explications, entre autres,  apparaissent sur un des panneaux de l’exposition de la Tour de la Chaine, dans le port de La Rochelle  où on peut visiter une exposition sur l’Histoire de la migration vers le nouveau monde.

Les filles de La Rochelle (la chanson et explications)

Tour de la Chaîne è La Rochelle

Le couvent de la Providence a été fondé en 1659. De 1661 à 1662, on y trouve des jeunes filles orphelines en attente d’un départ pour la Nouvelle-France. Si certaines viennent de Paris en provenance de l’Hôpital général, d’autres sont originaires de La Rochelle et des environs et elles  ont été amenées de force au couvent parce qu’elles sont filles de huguenots. Depuis la fin du siège de La Rochelle en 1629, on mène la vie dure aux protestants. Certains se voient dans l’obligation de faire un choix pénible : abjurer sa foi dans l’église réformée ou quitter. Des  métiers leurs sont interdits.

Couvent de la Providence à La Rochelle

Difficile de dire parmi les filles de La Rochelle lesquelles ont été concernées  par ces conversions forcées. Sur les panneaux explicatifs de la Tour de la Chaîne des noms sont cités sans plus de précisions: Marie Targer, Louise Gargotteau, Françoise Moisan, Catherine Barré, Marie Martin, Catherine Pillet, Marie Biret, Catherine Moitié, Marguerite et Élisabeth Doucinet, Catherine Paulo, Marie Doucet et Marie Faucon. Toutes ne sont pas protestantes. Elles ont cependant un point commun : elles sont arrivées en Nouvelle-France en 1662 ou 1663 et la plupart étaient filles du roi. Parmi celles-ci, on peut en citer au moins sept qui étaient nos ancêtres côté Vaillancourt, Lapierre ou Chartrand.

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Marie TARGER

Temple protestant de La Rochelle

Née le  22 février 1642 à La Rochelle, elle est la fille de Daniel TARGER, un  marinier et de Louise MARTIN. Elle est baptisée au  Temple calviniste de Villeneuve. Marie TARGER  arrive en Nouvelle-France  à l’âge de 21 ans. Quelques mois après, soit le 22 novembre 1663, elle épouse  à Château Richer  Jean Royer avec qui elle aura sept enfants. Il est  originaire de Saint-Cosme-en-Varais (Sarthe).

Jean Royer avait eu, un an plus tôt une enfant illégitime  de Madeleine Du Bois une autre fille originaire de La Rochelle arrivée en 1661 (elle aussi notre ancêtre).
Son époux   meurt vers 1676. En secondes noces, Marie  épouse Robert Tourneroche avec qui elle aura six autres enfants.

Nous ne connaissons pas la date exacte de son décès survenu après mars 1712. Elle avait plus de 70 ans.

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Marguerite DOUCINET

Marguerite DOUCINET née 14 février 1641 à La Rochelle et baptisée au temple calviniste le 17 du même mois. Elle est la fille  d’un maître cordonnier, Pierre DOUCINET et de Marie Fleurance CANTEAU. Elle arrive en 1662. Contrairement à sa sœur Élisabeth, ancêtre côté Chartrand,  arrivée en 1666, elle ne figure pas sur la liste des filles du roi établie par Yves Landry [1] .

Marguerite Doucinet  épouse Philippe Matou dit Labrie, originaire de la région de Seine et Marne, le 28 décembre 1662 à Québec. Dix enfants naîtront de cette union.Parmi ceux-ci, nos ancêtres Jeanne et Marie.

Une des filles de Marguerite Doucinet , Madeleine  épousera Jean Hautdecoeur qui sera accusé plus tard du meurtre du marchand Pougnet et pendu[2]. Vie mouvementée que celle de cette mère qui meurt à l’âge de 57 ans à Montréal.

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Louise GARGOTTIN ou GARGOTTEAU

Louise GARGOTTIN est née vers 1641  à Thairé, non loin de La Rochelle. Fille de  Jacques GARGOTTIN et de Françoise BERNARD, elle arrive à Québec avec un contingent de filles du roi  le 30 juin 1663, à l’âge de 22 ans environ.  Le 26 février 1664 à Château-Richer elle épouse  François-Daniel PERRON dit Suire (1638-1678), avec qui elle aura six enfants.

Daniel Perron est commis et commissionnaire, il est  le fils naturel d’un important marchand, armateur de La Rochelle François PERRON et de Jeanne SUIRE sa maîtresse. Originaire d’une famille protestante,  Perron va abjurer à Montréal le 6 décembre 1663, quelques mois avant son mariage avec Louise.

Veuve de son premier mari, elle épousera le 7 novembre 1678, Charles-Louis Alain avec qui elle aura un enfant. Elle se trouve veuve à nouveau  en 1699. La date précise de son décès est  inconnue (après février 1704, moment où elle fait son testament). Elle avait environ 63 ans.

Françoise MOISAN

Françoise MOISAN est née vers 1645 à La Rochelle  dans le quartier bourgeois de Saint-Barthélémi. Elle est la fille d’un laboureur à bras et jardinier nommé  Abel MOISAN, et de Marie SIMIOT. À 18 ans, Françoise arrive avec le contingent des filles du roi de 1663. Elle épouse  à Montréal Antoine BRUNET dit Belhumeur (~ 1644-~ 1694), domestique des Sulpiciens, originaire de la paroisse Saint-Nicolas de La Rochelle. Ce couple aura huit enfants, dont trois comptent parmi nos ancêtres : François, né en 1665 (Vaillancourt et Chartrand), Élisabeth née en 1674 (Vaillancourt).et Marie Françoise  vers 1667 (Chartrand).

Mais Françoise Moisan a très mauvaise réputation. Selon Jean Patenôtre,  l’époux de feue sa fille Marie, elle a « toujours été la ruine et le sujet de la débauche de la jeunesse de toute la côte Saint-François et elle continue à vivre dans ses infamies». (4)

 

Françoise Moisan habitait la deuxième rue à gauche rue Saint-François. Elle aura ensuite une maison rue Saint-Joseph (la troisième rue partant de la gauche).

Elle est accusée par Patenôtre  de corrompre sa seconde épouse, Marie Robidoux. Plusieurs témoins vont alors comparaître devant le procureur  Migeon de Branssat. Aux dires des uns et des autres, Françoise Moisan  épouse d’Antoine Brunet dit Belhumeur  a plusieurs amants qui se battent parfois entre eux pour se disputer les faveurs de la belle. Françoise est particulièrement populaire auprès des soldats, malgré l’interdiction faite par leurs supérieurs de fréquenter sa maison.

André Huneau  déclare que la Brunet a de tout temps « mené une vie dissolue et infâme, et laquelle l’a lui-même suborné  pendant deux ans et  a vécu avec  elle comme  mari et  femme. Et elle était  même si impudique que,  pour satisfaire sa brutalité, elle n’avait aucun  égard si ses filles qui étaient grandes  et âgées de douze ou treize ans étaient présentes ».

Un de ses amants les plus assidus, un dénommé Pillereau  ne lâcherait pas la Brunet d’une semelle, ce qui indispose d’autres prétendants. Un témoin rapporte que  « le nommé Manceau soldat de la compagnie de monsieur  le marquis de Crisaphy qui voyait ladite  Bellehumeur avec le nommé Maisonneuve son camarade ont battu et maltraité le nommé Pillereau de ce qu’il voyait ladite  Belhumeur en lui disant que c’était leur femme ».

Françoise Moisan dite la Brunet ou la Belhumeur subit elle-même parfois les foudres de ses amants. Un dénommé Delorme qui «allait coucher chez ladite  Belhumeur lorsque son mari en était absent, ce qui arrivait fort souvent » la maltraite un jour «à cause qu’il avait trouvé d’autres  personnes couchées avec elle».

Devenue veuve vers 1694, au seuil de la cinquantaine,  elle épouse en secondes noces un marchand, Pierre Perthuis dit Lalime veuf de Claude Damisé . Elle est alors au seuil de la cinquantaine et semble avoir bien géré ses avoirs personnels. Son nom figure lors de transactions de prêts de ventes et de locations.

Un  an après son mariage avec Pierre Perthuis elle fait reconnaître les biens qu’elle a apporté lors de son mariage, entre autres : «un lit de plume couvert de cotty avec son traversin couvert de cotty, une matelas de laine neuf, une couverte verte de Normandie presque neuve, une courte pointe qui lui a coûté 32 livres, une tamis de soie, une demoiselle d’étain contenant plus d’un pot, six couteaux de table a manche de corne … sept peaux de chevreuil…huit minots de pois …dix minots de blé estimés à 32 livres 10 sols ».[3] Son second  mari meurt deux mois plus tard.

Françoise Moisan a environ 73 ans lorsqu’elle décède à Contrecoeur en 1718. Sept ans auparavant, elle avait vendu sa maison de pierre de deux étages de la rue Saint-Joseph pour la somme de 1 450 livres.  Dans son testament rédigé cette année-là, elle lègue 100 livres au curé pour son service et 150 livres aux Récollets pour faire dire des messes pour le repos de son âme.

Catherine PAULO

Catherine PAULO dite Collau est née vers 1645 à La Rochelle dans la paroisse de Notre-Dame-de-Cougnes. Elle est la fille  de Pierre PAULO et de Renée CORDETELLE.

Fille du roi arrivée avec le même contingent de 1663, elle aurait été âgée d’environ 18 ans lorsqu’elle fait la traversée. Elle venait rejoindre sa cousine, Marie Paulo, arrivée dans la colonie quelques années plus tôt.

En novembre 1663, elle épouse Étienne CAMPEAU (1638-1692) qui est  domestique de Jacques Le Ber et de Lemoine. Cet homme est  maçon de profession. Le couple aura quinze enfants  dont douze se sont mariés et ont eu une descendance

Catherine Paulo a environ 47 ans lorsque son époux meurt en 1692.

Le 11 février 1701, Sa fille Élisabeth (notre ancêtre côté Vaillancourt) donne naissance à un enfant illégitime , une fille prénommée Marie-Madeleine. Le père pourrait fort bien être Nicolas Lemoine car le 21 mars suivant, Catherine Paulo donne une procuration à son fils Etienne pour qu’il poursuive en justice Nicolas Lemoine pour le rapt et le viol d’Elisabeth Campeau. On ne sait ce qu’il advint de cette poursuite, mais le 15 août suivant, Élisabeth épousait Pierre Valiquette. L’enfant née si malencontreusement est morte à Varennes deux ans plus tard.

Catherine Paulo a 76 ans lorsqu’elle meurt en avril 1721.

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Marie FAUCON

Marie FAUCON dite Lafond est baptisée à Brouage, église Saint-Hilaire, le 28 mars 1644. Ses parents sont Pierre FAUCON et de Antoinette BERGER.

Elle a 19 ans lorsqu’elle arrive comme fille du roi à Québec. Elle était précédée par sa cousine Jeanne Rousselier. C’est à Montréal qu’elle épouse Guillaume CHARTIER dit Robert (~ 1636-1707),  un tailleur d’habits originaire de La Flèche arrivé avec la grande recrue de 1653.

Ils auront onze enfants dont deux comptent parmi nos ancêtres côté Lapierre, Robert et Élisabeth.

Son époux meurt en 1707. Dès l’année suivante, elle épouse François Jocteau qui meurt six jours plus tard. Marie FAUCON dite Lafond est décédée le mercredi 4 décembre 1709, à l’âge de 65 ans, à Pointe-aux-Trembles.

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Élisabeth ou Isabelle DOUCINET

Isabelle Doucinet  a été baptisée au  19 mai 1647 au  Temple calviniste de  La Rochelle. Elle est la fille de Pierre DOUCINET, et de Florence CANTAU et la sœur de Marguerite Doucinet..

Isabelle DOUCINET arrive à Québec comme fille du roi  le 11 août 1666, à l’âge de 19 ans.
avec 200 livres de dot. Elle a été précédée au pays par sa sœur Marguerite, arrivée en 1662. Elle épouse le charpentier  Jacques BÉDARD (1644-1711), fils de Isaac BÉDARD et de Marie GIRARD baptisé lui aussi au Temple calviniste de la Rochelle. Ce couple aura 17 enfants.
En 1671, Élisabeth Doucinet témoigne à la Prévoté de Québec au sujet d’une histoire de sorcellerie. Elle déclare qu’ elle a « ouy dire» par Jacques Cassien, gendre de Perette Ozilionne, que tous les parents de Perrine Moreau sont des sorciers et que certains mirent du feu dans des sabots et que « les sabots petterent comme s’il y a de la poudre et partirent en beaucoup de morceaux. » Elle ajoute que Perrine Coirier lui a dit qu’elle a été priée par une femme de lui apporter « un pot neuf et des esguilles pour l’ amour de dieu ». Cette femme croit que Perrine Moreau a fait mourir son mari.[3]

Isabelle DOUCINET est décédée le 19 novembre 1710, à l’âge de 63 ans, à Charlesbourg.

Marie Vaillancourt

 

[1] Landry, Yves, Les filles du roi au XVIIe siècle, Leméac, 434 p.[2] Myre, Marcel, Madeleine Matou, La femme du meurtrier de Boucherville 1665-1699, Septentrion, 150p.

[3] Langlois, Michel, Dictionnaire biographique des ancêtres Québécois,

(4) Séguin, Robert-Lionel, La vie libertine en Nouvelle-France au XVIIe siècle, Leméac, 1972. P. 80 à 84.

By René Arbour

Management certificate of Credit Card (New York - 1983-84) Bac Administration , Security for the people (Minesota 1984)