La Beauce et son Histoire

Préface

Le présent livre s’adresse en premier lieu aux personnes qui sont en démarche d’alphabétisation. Il se veut donc un survol instructif de l’histoire de la Beauce. Les informations y ont été simplifiées pour en faciliter la compréhension.

Nous croyons que pour apprendre, comprendre et interpréter ce monde, il nous faut partir de notre propre culture, de notre culture immédiate, pour ensuite accéder à la culture générale. D’abord nous connaître: nous, notre communauté, notre région.

Nous souhaitons que ce document permette aux lecteurs de découvrir la Beauce avec ses particularités, sa façon unique d’exprimer son quotidien, son histoire, sa langue, ses accents et ses expressions. Nous croyons que la conscience de soi et de sa propre culture nous conduit, dans un monde s’élargissant, à la connaissance des autres dans le respect des différences humaines.

L’élaboration de ce matériel pédagogique vise à intégrer l’histoire, la géographie et la culture de la Beauce dans les matières de base, dans le but de développer de l’intérêt pour la culture et une fierté d’appartenance; ce qui permet à chacun(e) de découvrir et de construire son identité et son rapport au reste du monde.

Un cahier d’exercices, comprenant des questions sur le texte, est aussi disponible pour ceux et celles qui le désirent. Un corrigé est inclus dans ce cahier.

La page couverture
Le dessin se retrouvant sur la page couverture représente les «Jarrets noirs».

Bonne découverte!!

Carte récente de la Beauce

 

[Voir l’image pleine grandeur] Carte géographique récente de la Beauce.

I- Nos origines

La présence amérindienne

L’espace qui deviendra la Beauce n’était aux 16e et 17e siècles qu’un territoire de chasse et de pêche avec d’immenses forêts. Celui-ci représentait une voie de passage entre la ville de Québec et le sud, aujourd’hui appelé le Maine. Bien que 1737 soit la date officielle de l’ouverture de la Beauce, avec l’arrivée des Européens, cette date ne coïncide pas avec le début d’une présence humaine sur le territoire. En effet, les Amérindiens, que l’on appelait aussi Indiens, ont été les premiers à habiter la région. Les premiers Amérindiens qui auraient fréquenté le sol beauceron seraient les Abénaquis. Certains ont séjourné à l’occasion en Beauce mais, étant nomades, la grande majorité des Abénaquis n’ont fait que passer.1

 

[Voir l’image pleine grandeur] Un Abénaquis avec une hache et un fusil dans les mains.

Même s’ils n’ont jamais connu dans la région un établissement stable et durable, les Amérindiens ont laissé des traces. Nos contacts avec les Abénaquis nous ont procuré certaines traditions et façons de faire. Les Beaucerons ont conservé diverses techniques de chasse, telles l’utilisation d’arcs, de flèches et de collets2 et des façons de faire comme mâcher de la gomme de sapin.3 Le passage des Abénaquis dans la région a également influencé le nom donné à certains lieux beaucerons. Ces noms sont encore utilisés aujourd’hui. Prenons par exemple le barrage Sartigan érigé à Saint-Georges en 1967. Celui-ci a été construit dans le but de régulariser le niveau d’eau de la rivière Chaudière afin d’atténuer les débâcles printanières. Les dirigeants de l’époque lui ont donné le nom Sartigan en l’honneur des Amérindiens. C’est par ce nom que les Abénaquis désignaient la rivière Chaudière. Ce mot signifie pour eux rivière ombreuse ou rivière bruyante.4

La Beauce: un lieu de passage

Au 17e siècle, il n’existait aucune route reliant Québec à l’Acadie et au Maine. Par sa situation géographique, la Beauce représentait un lieu de passage entre Québec et les peuples habitant au sud. La rivière Chaudière devenait l’une des routes à suivre.

Quelques personnes importantes ont traversé la Beauce au cours du 17e siècle. La plus connue d’entre elles est le missionnaire français Gabriel Druillettes. Ce dernier avait été choisi pour aller enseigner chez les Abénaquis qui demeuraient au sud de la Beauce, dans le Maine. L’objectif du père Druillettes était de propager la foi et de réussir à convertir quelques Amérindiens. Dès son arrivée dans leurs campements, il a commencé son travail d’instruction. Il s’est occupé également des malades et a baptisé les mourants. Il a même réussi à apprendre la langue abénaquise. Le père Druillettes a développé de bonnes relations avec les Abénaquis.

Cette mission a amené celui-ci à traverser la région beauceronne plus d’une fois. Ces expéditions ont nécessité beaucoup de courage. Lors de la dernière traversée, il a dû affronter le froid et le manque de provisions. Il a même été forcé de faire bouillir le cuir de ses vêtements et de le manger.5 Voyager à cette époque n’était pas de tout repos!

La Beauce avant 1736

L’intendant de la Nouvelle-France, Jean Talon, a développé un projet des plus ambitieux. Il souhaitait construire une route reliant la Nouvelle-France à l’Acadie en passant par la rivière Chaudière.

En 1672, Talon a concédé une terre à François Miville. Les dimensions de cette terre étaient de 16 arpents sur 50 arpents. Celle-ci aurait été située en face de l’Île Perreault, où l’on retrouve aujourd’hui Sainte-Marie. Elle aurait servi à établir le commerce des fourrures avec les Abénaquis. Par la suite, d’autres terres ont été données aux Jésuites pour développer leur mission avec les Abénaquis. Cependant, aucune de ces terres n’aurait été exploitée. En 1696, Talon a donné une terre à François Desjordy. Elle était également située sur le bord de la rivière Chaudière. Celle-ci a été abandonnée par son propriétaire.6

Par ces concessions de terres, l’intendant Talon espérait établir un réseau de relais sur la route qu’il comptait développer entre la Nouvelle-France et l’Acadie. Malheureusement, la construction de cette route était trop dispendieuse, le projet a été abandonné et aucune des terres données ne s’est développée de façon durable.7 Il a fallu attendre encore quelques années avant que ne réapparaisse un intérêt pour la Beauce.

Le contexte de colonisation

Plusieurs raisons ont été à l’origine du développement de la Beauce au 18e siècle. Premièrement, la population de la Nouvelle-France a plus que doublé en 25 ans. Donc, de moins en moins de bonnes terres étaient disponibles pour les Européens qui arrivaient dans notre pays ou pour les fils des colons déjà établis. Il devenait donc nécessaire d’ouvrir de nouveaux territoires.

D’autre part, la rivière Chaudière est devenue un enjeu stratégique pour les autorités françaises, car elle représentait la distance qui les séparait d’avec les Anglais déjà établis au sud de la Beauce. Depuis quelques années, intéressés par le commerce des fourrures, les Anglais avaient commencé à envahir des terres, se rapprochant ainsi de plus en plus de Québec. Devant cette menace anglaise, ces Français ont développé une stratégie, c’est-à-dire occuper ce territoire vacant les séparant des Anglais. C’est ainsi que l’intérêt pour la Beauce a été ravivé. Il en a résulté une politique de distribution de terres le long de la Chaudière qui visait à contrer l’expansion anglaise.8

C’est dans ce contexte que s’est faite l’ouverture de la Beauce que les autorités françaises ont appelé «Nouvelle-Beauce». Aujourd’hui, on pense que ce nom aurait été donné à la région pour établir un lien avec la Beauce française, qui était une province de France composée de terres assez fertiles, propices à l’agriculture.9 Le nom de Nouvelle-Beauce a donc sûrement servi à attirer l’établissement des colons, car il a dû refléter une image positive pour les Français. C’est ainsi qu’ont été créées les premières seigneuries.

Les premières seigneuries

Le système seigneurial

Les dirigeants de la Nouvelle-France, qui souhaitaient ouvrir de nouvelles terres au sud de Québec, ont adopté un système de développement appelé seigneuries. Le principe des seigneuries était de diviser le sol en longs rectangles de terre situés de part et d’autre d’un cours d’eau.10

 

[Voir l’image pleine grandeur] Divisions du sol en longs rectangles de terre.

Une fois les seigneuries découpées, les dirigeants désignaient à chacune d’elles une personne responsable de son développement. Cette personne portait le titre de seigneur. Seules les personnes d’origine sociale élevée pouvaient être choisies pour ce titre. Il est important de comprendre qu’à cette époque, le mot «seigneur» représentait une personne nommée par le roi de France, responsable du développement des terres qui lui étaient données.

Le seigneur avait plusieurs obligations. En acceptant ce titre, il s’engageait à construire un manoir sur sa seigneurie et à l’habiter. La tâche du seigneur consistait à mettre ses terres en valeur en favorisant l’installation de nouveaux colons. C’est pourquoi il avait l’obligation de mettre en place des routes, des moulins à scie et des moulins à farine le plus rapidement possible, de façon à intéresser les colons à venir s’y établir. Il devait même voir à l’organisation d’activités religieuses.11

Le seigneur avait aussi comme obligation d’accorder des terres aux colons qui le demandaient. Le colon qui recevait une terre était appelé censitaire. Il avait plusieurs devoirs envers le seigneur. Il devait mettre sa terre en valeur. Donc, dès que le censitaire recevait son lot, il s’occupait de le défricher et d’y construire un abri qui deviendrait plus tard sa maison. Il commençait à cultiver pour être en mesure de se nourrir.12 Le censitaire avait également l’obligation de fournir annuellement au seigneur des cens (redevances) et des rentes qu’il pouvait payer en argent ou en récoltes.13 Ces obligations représentaient en quelque sorte une taxe annuelle.

L’ouverture de la Nouvelle-Beauce

Le 23 septembre 1736 correspond à la naissance officielle de la Nouvelle-Beauce. Les dirigeants de la Nouvelle-France ont concédé trois seigneuries qui étaient situées le long de la rivière Chaudière. Ces trois premières seigneuries correspondent aujourd’hui à St-Joseph, Ste-Marie et Beauceville. Au cours des années qui ont suivi, la Nouvelle-Beauce s’est développée. Des moulins ont été construits. Pour assurer la présence d’un prêtre, les seigneurs ont vu à la construction de chapelles. Ils ont développé un chemin de charrette afin de relier les seigneuries beauceronnes à Québec.14

De 1737 à 1760, les premières seigneuries se sont transformées. Cette période est marquée par le développement de l’agriculture. L’agriculture fournissait la nourriture nécessaire à la survie des colons et, s’il y avait des surplus, ils en faisaient le commerce. L’agriculture en Nouvelle-Beauce a été longtemps dominée par la production de blé.15

L’établissement de colons: une histoire de famille

Les colons qui sont venus habiter le territoire beauceron provenaient principalement de Québec et de ses environs. En effet, ils sont arrivés pour la plupart de la Côte-de-Beaupré, de l’Île d’Orléans et des seigneuries de Charlesbourg. D’autres provenaient également de Lauzon et de Bellechasse.

Les premiers colons à venir s’installer en Nouvelle-Beauce avaient souvent des liens de parenté. Ceux-ci sont arrivés, en majorité, déjà mariés avec plusieurs enfants dont certains en âge de s’établir. De plus, les colons qui se sont installés venaient souvent rejoindre des membres de leur famille ou étaient rejoints par d’autres membres de leur parenté. Ce qui a fait du développement de la Nouvelle-Beauce une réussite, c’est en quelque sorte son histoire de famille. Pour survivre dans ce nouveau coin de pays, l’entraide était nécessaire. Donc, il était favorable de venir s’installer en groupe.16

Cette histoire de familles laisse encore des traces aujourd’hui dans la Beauce. Vous n’avez qu’à consulter des annuaires téléphoniques de la région pour constater l’importance de certains noms de famille. Les Beaucerons connaissent sûrement dans leur entourage quelqu’un portant le nom de Poulin, Roy, Lessard, Vachon, Veilleux ou Bolduc. Nous retrouvons également bon nombre de Nadeau, Lachance, Jacques, Morin et Cliche.17 Ce phénomène a peut-être contribué à développer et entretenir l’importance des surnoms dans la région.

Les surnoms

«La Beauce a la réputation d’être une terre à surnoms»18. C’est peut-être parce qu’à une certaine époque en Beauce, les familles avaient tellement d’enfants qu’il devenait impossible de les identifier par leur nom.19 Donc, pour pouvoir différencier chaque individu, les Beaucerons ont utilisé les surnoms.

Certains de ces surnoms sont même devenus des noms. Ils pouvaient représenter des éléments de la nature comme les Lamontagne ou les Dulac. Ils pouvaient également représenter des objets tels les Lagrange, les Perron et les Grenier. D’autres étaient attribués selon un exploit accompli. Nous pouvons penser aux Lachance et aux Gagné.20 Essayez de clarifier votre nom de famille, vous pourriez faire une découverte intéressante sur son origine.

Les Beaucerons avaient et ont encore aujourd’hui une façon particulière de s’identifier. L’utilisation de surnoms est toujours présente dans la région. Ce qui est également particulier, c’est l’habitude qu’ont les gens de s’identifier en nommant leur père et grand-père. «Je suis Pierre à Joseph à Antoine» ou encore «je suis Isabelle à Jean à Ti-Noir». Cette façon de se nommer doit rappeler quelque chose aux Beaucerons!!!

Il est intéressant de comprendre l’origine des noms et des surnoms. Les noms des villes ou des villages peuvent aussi nous permettre de faire des découvertes amusantes.

Le nom des lieux

Il est intéressant d’observer le nom que l’on donne à un territoire, à une ville, à une rivière, car chaque nom possède une signification particulière. Certains noms de lieux beaucerons ont été donnés pour représenter des caractéristiques du paysage. Nous n’avons qu’à penser à Notre-Dame-des-Pins qui s’appelait autrefois la Touffe de Pin.21 Les gens qui fréquentaient ce territoire pouvaient y voir une colline garnie de pins. Ce qui explique le nom que ce village porte encore aujourd’hui.

Certains noms avaient pour but de rendre hommage aux seigneurs qui ont développé ces territoires. Le seigneur donnait son nom au territoire et l’Église s’occupait de lui donner un nom de saint.22 Par exemple, le nom de la ville de Saint-Joseph provient du premier seigneur à venir s’y établir, soit le seigneur Joseph Fleury de la Gorgendière.

Le nom Saint-Georges a été choisi pour honorer le souvenir d’un marchand d’origine allemande, Johann Georg Pozer. Celui-ci est devenu propriétaire de la seigneurie Aubert-Gallion en 1808. C’est à partir de ce territoire qu’a été fondée la ville de Saint-Georges.23

Le rapide du Diable de Beauceville représente une légende. Celle-ci rappelle la rencontre d’un Beauceron qui était prêt à faire un marché avec le diable, à lui vendre son âme en échange de pépites d’or.24

Comme vous pouvez le constater, il peut être intéressant de comprendre l’origine des noms de lieux beaucerons. Chose certaine, à travers ces noms, la mentalité et la culture des gens de cette région y sont représentées.

Les corvées

Nous avons mentionné plus tôt que pour survivre en Beauce au 18e siècle, il fallait de l’entraide. Malgré le nombre important de tâches quotidiennes à accomplir, les Beaucerons laissaient, de temps à autre, leurs besognes de côté pour aider autrui. Ils fournissaient une aide au seigneur ou aux autres habitants, parfois par devoir, parfois par compassion, mais aussi parfois par plaisir. Il est donc impossible de passer sous silence les fameuses corvées beauceronnes.

Dès leur établissement en Beauce, les premiers colons ont participé à des corvées. Certaines étaient obligatoires à cette époque, tel l’entretien des chemins pendant l’hiver. La plantation du mai était une autre corvée à laquelle devaient participer les habitants. Tous les ans, le premier jour de mai, les colons plantaient un arbre devant le manoir seigneurial de façon à rendre hommage à leur seigneur.

Les Beaucerons participaient à bon nombre de corvées. Plusieurs d’entre elles n’étaient pas obligatoires. Les corvées variaient selon les saisons. L’été, les gens se réunissaient pour construire des granges. L’automne apportait avec lui son lot de travail. Les habitants s’entraidaient pour faire la corvée de boucherie ou pour préparer le tissu pour confectionner les vêtements. En hiver, c’était le tissage des courtepointes.25

 

[Voir l’image pleine grandeur] Les Beaucerons travaillent au champs.

Les corvées n’étaient pas seulement des tâches à accomplir. Elles permettaient aux habitants d’avoir, en quelque sorte, une vie sociale. En effet, certaines corvées s’étalaient sur plusieurs semaines. Alors les gens se réunissaient de maison en maison pour les accomplir. Elles étaient souvent suivies d’un repas ou de danses. Lors de ces fameuses veillées beauceronnes, les jeunes de toutes les familles y participaient. Ces réunions leur permettaient souvent de rencontrer un possible prétendant ou une future prétendante…26

L’entraide entre les Beaucerons existe encore aujourd’hui. Lors d’événements particuliers tels que les inondations, les gens se réunissent pour aider ceux qui sont dans le besoin. Nous pouvons également penser aux personnes victimes d’un incendie. Plusieurs personnes vont les aider à reconstruire les bâtiments brûlés.

Les corvées se sont modifiées au fil des temps. Malgré qu’elles soient moins présentes aujourd’hui, elles font encore partie des coutumes des Beaucerons. En effet, qui n’a jamais entendu parler de la «fameuse solidarité beauceronne»?

Les ponts et traverses de la rivière Chaudière

Au 18e siècle, avant la construction des ponts, les habitants de la Beauce ont eu recours à plusieurs moyens pour traverser la rivière Chaudière. Ils ont utilisé les passages à gué qui étaient des parcours où le niveau de l’eau était tellement bas que les gens pouvaient traverser la rivière à pied.

Certains habitants préféraient se servir d’un canot pour faire leurs déplacements sur l’eau. Durant l’hiver, les gens pouvaient traverser la rivière à pied, car elle devenait en quelque sorte un pont de glace.27

Le début de la construction du premier pont en Beauce a eu lieu le 1er octobre 1819 à Ste-Marie. Il devait mesurer 300 pieds de longueur et 24 pieds de largeur. Le pont devait avoir une hauteur de 5 pieds au-dessus de la rivière. Malheureusement, le 27 février 1820, alors qu’il était presque terminé, une partie du pont s’est effondrée et quatre ouvriers y ont perdu la vie. Cette catastrophe a eu pour conséquence le retard de la construction du pont de Ste-Marie.28

Les habitants ont continué à utiliser d’autres moyens pour voyager sur l’eau. Par la suite, ils ont mis au point une traverse. Ils attachaient un bateau à fond plat aux deux rives par un système de câbles et de poulies.29 Au 18e siècle, ainsi qu’au début du 19e siècle, les Beaucerons ont dû faire preuve de beaucoup d’ingéniosité dans leurs moyens de transport.

La Conquête

Aux 17e et 18e siècles, plusieurs conflits ont éclaté en Europe. La France et l’Angleterre étaient impliquées dans différentes guerres. Ces deux pays se battaient pour devenir le pays le plus puissant. Ces guerres ne se déroulaient pas seulement en Europe mais également ici en Amérique du Nord. La Nouvelle-France était une colonie française alors que les territoires au sud, qui sont aujourd’hui les États-Unis, étaient occupés par les Anglais d’Angleterre. Cette lutte de pouvoir a aussi eu lieu dans notre pays.

Il existait plusieurs différences entre les colonies anglaises et les colonies françaises. Les Anglais étaient beaucoup plus nombreux et leurs armées mieux organisées. De plus, le commerce que faisaient les colonies anglaises était payant pour l’Angleterre. Donc, les Anglais et les Français se faisaient concurrence pour le commerce des fourrures. Cette concurrence entre les deux pays a mené à une guerre qu’on appelle aujourd’hui la Conquête.30 Ce fut la conquête de la Nouvelle-France par les Anglais. Cette guerre a duré de 1754 à 1760 et les Anglais ont été les vainqueurs. La Conquête a été un point tournant pour la Nouvelle-France, car c’est à partir de cette guerre qu’elle est tombée sous l’autorité des Anglais.

Ce conflit a également eu des conséquences pour la Nouvelle-Beauce. Étant une région moins touchée par la guerre, elle est devenue pour certains une «terre d’accueil». Plusieurs personnes sont venues s’y réfugier. En 1762, on comptait dans la région 86 noms de famille différents alors que 9 ans plus tard, on pouvait en compter 138.31 Plusieurs immigrants s’y sont installés. Ils se sont ainsi sauvés des conflits qui ont éclaté à différents endroits en Amérique du Nord. Les territoires anglais au sud de la Nouvelle-Beauce ont également été touchés par ces conflits.

Bénédict Arnold

À partir de 1770, l’espace qui deviendra les États-Unis a été touché par plusieurs émeutes. Les colonies anglaises qui l’habitaient ont souhaité obtenir leur indépendance face à l’Angleterre. Ces colonies voulaient avoir la liberté de se gérer elles-mêmes. Dans leur plan de lutte pour leur indépendance, elles souhaitaient aussi s’emparer de Québec pour obliger l’Angleterre à abandonner ses colonies. C’est dans ce contexte que s’est effectué le passage de Bénédict Arnold en Beauce.

Le 15 septembre 1775, Bénédict Arnold et son armée de 1100 hommes ont commencé leur voyage vers Québec. Leur expédition a consisté à traverser le Maine, à remonter la rivière Kennebec et ensuite la rivière Chaudière pour atteindre Québec. Cependant, certaines difficultés sont venues compliquer leur voyage. Le 16 octobre, avant d’arriver au lac Mégantic, ils ont été victimes d’une tornade qui aurait fait augmenter le niveau de l’eau de 2,5 mètres en 9 heures. Bénédict Arnold et ses troupes se sont égarés et les barques se sont renversées. Leurs provisions de nourriture ont été détrempées. Par la suite, ils ont dû affronter la neige et le froid.

C’est dans un état d’épuisement que Bénédict Arnold et ses troupes sont arrivés en Nouvelle-Beauce. Les Beaucerons les ont aidés à se procurer la nourriture nécessaire pour se ravitailler. Bénédict Arnold a établi temporairement son quartier général à Sainte-Marie afin de prendre des forces et réorganiser ses troupes. Ensuite, le quartier général a été déplacé à Pointe-Lévy (aujourd’hui Lévis) où d’autres troupes sont venues le rejoindre. L’attaque de la ville de Québec était prévue pour la nuit du 30 au 31 décembre 1775. Les troupes se sont établies près de Québec jusqu’au mois de juin 1776. Cette tentative de prendre Québec a été un échec pour Bénédict Arnold. L’Angleterre a envoyé des renforts et les habitants de Québec étaient de plus en plus hostiles face aux troupes de Bénédict Arnold. Celles-ci ont dû abandonner et retourner aux États-Unis. Bénédict Arnold a pris une autre route que la Chaudière pour atteindre le Maine.32

Le passage de Bénédict Arnold et ses hommes a laissé des traces en Nouvelle-Beauce. Premièrement, nous avons pu constater que même si la Nouvelle-Beauce était sous domination de l’Angleterre, ses habitants ont en quelque sorte aidé les «Américains» dans leur lutte pour leur indépendance. Ils leur ont fourni des vivres lors de leur passage sur ce territoire. L’attitude des Beaucerons était peut-être due à leur situation géographique. La Nouvelle-Beauce était une colonie sous domination anglaise située très près des États-Unis. Cette attitude des Beaucerons était peut-être également justifiée par l’opportunité de commercer avec leurs voisins du sud. Plusieurs raisons pourraient en effet expliquer le lien qui unit les Beaucerons et les «Américains». Il est intéressant de constater que ce lien avec les États-Unis est toujours présent aujourd’hui. En ce qui concerne Bénédict Arnold, il existe un bâtiment nous rappelant son passage. Qui ne connaît pas l’Hôtel Bénédict Arnold situé au sud de Saint-Georges?

II- Le développement de notre région

La croissance de la population

L’évolution de la population de la Beauce aux 18e et 19e siècles se caractérisait par une croissance très forte. À partir de 1736, les gens venaient s’installer de part et d’autre de la rivière Chaudière. Les seigneuries de Ste-Marie et de St-Joseph se sont développées assez rapidement. Les seigneurs ont su développer les infrastructures pour attirer les colons.

Évolution de la population des trois premières seigneuries de la Beauce

 

Années 1762 1765 1784 1790 1825 1831 1844 1851 1861 1871 1881 1891
Localités
Ste-Marie 294 357 775 1128 4137 5113 3075 3263 3395 3166 2782 2897
St-Joseph 340 499 642 813 1775 2098 2979 2565 3079 2981 2830 3163
St-François (Beauceville) 96 —- 379 518 2041 2531 2203 2874 3302 3982 4181 4022

 

Source: La Beauce et les Beaucerons. Portraits d’une région 1737-1987. P.30

Cependant, de 1860 à 1900, la croissance de la population beauceronne a été touchée par l’attrait pour les États-Unis. Les employeurs américains envoyaient des agents partout au Québec pour embaucher des Canadiens français. Ces agents tentaient de les convaincre des avantages d’un travail salarié comparativement au travail de la ferme. Même les femmes et les enfants pouvaient trouver des emplois s’ils le souhaitaient. Plusieurs Canadiens français y voyaient de nombreux avantages et ont décidé d’émigrer aux États-Unis. La Beauce, étant près de la frontière américaine, a été une des régions les plus touchées par ce phénomène. Certains Beaucerons sont partis s’établir dans les états du Massachusetts et du New Hampshire. D’autres se sont laissé tenter par ceux du Maine et du Vermont.33

La grande richesse du Maine, c’était sa forêt. Elle constituait 85% de tout son territoire. Les Beaucerons, étant donné leur proximité territoriale, ont été attirés par les chantiers forestiers du Maine. Ils étaient reconnus pour leur ardeur au travail et ils étaient très en demande dans les chantiers.34 C’est pourquoi la croissance de la population de certaines localités a subi un certain recul dans la deuxième moitié du 19e siècle.

Un autre facteur a pu être à l’origine de la baisse de la population dans certaines seigneuries: le mouvement de la population vers de nouvelles localités. Les terres se faisaient de plus en plus rares dans les seigneuries et certaines étaient hors de prix; les Beaucerons n’ont eu d’autre choix que d’aller s’établir dans les nouveaux territoires ouverts: les cantons.

Les cantons

À partir de la fin du 18e siècle, on assistait à une nouvelle expansion du territoire beauceron. Les colons ont commencé à s’établir dans des territoires qui n’étaient pas situés sur les bords de la Chaudière. De nouvelles terres étaient ouvertes. Les Anglais ont demandé un mode de division des terres qui se rapprochait de celui qu’ils connaissaient: les cantons. Le modèle seigneurial français a été abandonné pour le modèle anglais des cantons. Les colons qui se sont installés dans les cantons devaient dorénavant acheter leur terre contrairement aux seigneuries où l’on donnait la terre en échange de rentes payées annuellement au seigneur.35

De 1799 à 1810, c’était l’ouverture de plusieurs cantons dont Shenley, Tring et Dorset.36 Cette expansion a continué tout au long du 19e siècle. Le taux de natalité en Beauce et l’arrivée d’immigrants anglais ont contribué à faire augmenter rapidement la population de la Beauce.37

Évolution de la population de la Beauce: seigneuries et cantons

 

Années Nombre d’habitants
1762 730
1765 856
1784 1 796
1790 2 459
1825 8 202
1831 10 816
1844 19 616
1851 24 285
1861 30 518
1871 34 202
1881 39 297
1891 41 692

 

Source: La Beauce et les Beaucerons. Portraits d’une région 1737-1987. P.30

De 1800 à 1850, la Beauce a vécu plusieurs changements. Au fur et à mesure que sa population augmentait et que les défrichements progressaient, son économie s’est développée.

Le développement économique (1800-1851)

Au cours du 19e siècle, l’économie beauceronne a prospéré. Peu à peu s’organisaient des réseaux commerciaux pour couvrir tout le territoire. Plusieurs nouvelles bâtisses ont fait leur apparition. La population augmentait et les villages prenaient forme.

Le développement économique de la Beauce s’est fait en premier lieu au niveau de l’agriculture. Nous pouvions retrouver en Beauce des distilleries, des potasseries, des tasseries, des briqueries, des moulins à scie, à farine, à fouler ou à carder38.

Même si la majorité des Beaucerons se consacraient à l’agriculture, on a assisté à la diversification des métiers. Des cordonniers, selliers, charrons, forgerons et voituriers se sont établis en Beauce pour y exercer leur métier. Nous retrouvions également des marchands, aubergistes, menuisiers, charpentiers et tonneliers39.

Au début du 19e siècle, c’était à Sainte-Marie que se déroulait la majorité du commerce beauceron. Sainte-Marie était la paroisse la plus peuplée et la plus près de Québec, ce qui a facilité les échanges avec les commerçants de Québec. C’était dans cette localité que nous retrouvions la majorité des marchands. En 1831, on pouvait compter cinq magasins généraux à Sainte-Marie alors qu’il y en avait seulement deux à Saint-Joseph et deux à Saint-François (Beauceville)40.

Dans ces magasins généraux, on faisait le commerce de plusieurs articles. On y vendait des tissus et des articles de couture, des souliers, des bas, des gants et des foulards. On pouvait s’y procurer des articles ménagers et de la quincaillerie tels que des clous à bardeau ou à planche. Il était possible d’y acheter des vitres. Ces magasins vendaient même divers produits importés telles les épices. On pouvait acheter du poivre, de la cannelle, du gingembre et du clou de girofle. Certains marchands détenaient le permis nécessaire et faisaient aussi le commerce d’alcool41.

Le développement économique de la Beauce a eu d’autres répercussions. Des notaires, avocats, arpenteurs et médecins s’y sont installés pour exercer leur métier. Ces hommes scolarisés ont également participé au développement de la Beauce. Ils ont prôné la mise en place de services tels que l’éducation et la justice42.

Au cours du 19e siècle, la Beauce a subi des bouleversements importants. Les terres étaient de plus en plus rares et le prix à payer pour s’établir dans les seigneuries ou les cantons était très élevé. C’est dans ce contexte qu’on a vu émerger d’autres métiers. En vue d’amasser l’argent nécessaire pour s’établir, les jeunes hommes s’engageaient dans des moulins à farine, alors que les jeunes demoiselles travaillaient comme domestiques dans les familles plus riches. La Beauce est devenue au 19e siècle un réservoir important de main-d’œuvre.43

Une économie plus diversifiée (1850-1921)

De 1850 à 1921, on a assisté à d’importants changements économiques en Beauce. Les bases du commerce, établies au début du 19e siècle furent développées par la suite. Plusieurs secteurs ont été touchés par cet avancement.

L’agriculture

Le milieu agricole a vécu d’importants changements. L’industrie laitière s’est développée progressivement. Le nombre de vaches laitières par ferme augmentait et les Beaucerons étaient maintenant capables de transformer le lait en beurre et en fromage. On a vu l’apparition de plusieurs beurreries et fromageries. En 1882, il était possible de trouver à Sainte-Marie le premier séparateur-centrifuge à crème importé au Canada. En 1898, on retrouvait dans cette même localité 9 fromageries. En fait, dans les paroisses agricoles, presque chaque rang possédait une beurrerie ou une fromagerie.44

L’agriculture a commencé à se moderniser avec l’arrivée de la mécanisation. Même si la plupart des cultivateurs se servaient encore des chevaux et des bœufs dans leur travail, peu à peu les machines agricoles ont fait leur apparition dans la région. En 1871, nous pouvions compter en Beauce 8 moissonneuses-faucheuses et 789 batteuses.45 Au fil des ans, on a retrouvé ces nouvelles machines agricoles sur plusieurs terres et d’autres outils se sont développés pour faciliter la tâche aux cultivateurs.

Les chantiers forestiers

L’industrie forestière s’est développée en Beauce à partir de 1847. Des compagnies forestières ont donné des contrats de coupe de billots de pin jaune à Saint-Joseph et dans le sud de la Beauce. Dans la même année avait lieu la première grande drave sur la rivière Chaudière. Cependant, celle-ci n’était pas aménagée pour faire le transport du bois. Le flottage des billots sur la rivière a entraîné des problèmes pour les commerçants de bois. En 1917 et en 1922, le flottage du bois a causé d’importantes inondations. Le courant de la Chaudière ne pouvait se faire normalement car il était bloqué par les billots. Donc, lors de fortes pluies, la Chaudière débordait sur ses rives causant ainsi d’importants dommages. La drave sur la rivière Chaudière s’est terminée en 1947. Les commerçants ont par la suite utilisé le train pour transporter leur bois.46

L’arrivée du chemin de fer en Beauce a facilité l’industrie forestière. En 1875, une ligne de chemin de fer a été construite entre Lévis et Scott-Jonction et l’année suivante, on la reliait à Saint-Joseph. Le transport du bois ainsi facilité, les compagnies forestières ont engagé bon nombre de Beaucerons pour exploiter leurs lots à bois. Le bois est devenu en Beauce une source importante de revenus.47

La ruée vers l’or

En 1834, une jeune fille nommée Clothilde Gilbert a découvert par hasard une pépite d’or dans la rivière Gilbert. En 1835, le capitaine Baddely, ingénieur royal, confirmait la présence d’or dans la Beauce. «Les découvertes ne représentent que quelques centaines de dollars de précieux métal.»48 De 1834 à 1846, quelques cultivateurs ont fait des recherches près de Beauceville, mais aucun commerce d’or important ne s’est développé.

Après 1846, on a assisté à la première ruée vers l’or en Beauce. Dans les rivières Gilbert, Chaudière et des Plante, on retrouvait maintenant plusieurs orpailleurs ayant plus ou moins d’expérience dans le domaine. La possibilité de faire fortune rapidement a séduit plusieurs personnes de la Beauce et de Québec. Cette première ruée vers l’or a cependant comporté plusieurs déceptions.

À partir de 1862, on a assisté à une deuxième ruée vers l’or en Beauce. Elle était causée par la découverte de plusieurs pépites d’or par les frères Joseph, Féréol et Jean Poulin et leur neveu Narcisse Rodrigue. En une seule journée de travail, ils auraient trouvé 72 onces d’or. Suite à ces découvertes, plusieurs individus et compagnies minières sont venus s’installer en Beauce afin de s’enrichir. Ces gens sont venus de plusieurs coins du monde.

En effet, la chance des frères Poulin a attiré des gens de la Beauce et de Québec, mais également des États-Unis et même d’Europe. Les journaux de l’époque ont écrit sur le sujet. Suite à la parution de ces articles, plusieurs chercheurs et investisseurs tentaient l’aventure. À l’été 1864, il y avait 2000 travailleurs dans les mines de la Beauce.49

 

[Voir l’image pleine grandeur] Un travailleur de la mine qui mange.

«Des années 1870 jusque vers 1883, c’est l’âge d’or de l’histoire minière de la Beauce»50. Toutes les rivières de la Beauce ont été fouillées dans le but de découvrir de l’or. L’activité minière s’est poursuivie jusqu’à la fin du 19e siècle. De 1900 à 1910, faute d’argent, on a assisté à un certain abandon des mines beauceronnes.

De 1959 à 1964, une autre tentative de recherche d’or a été faite à Saint-Simon-les-Mines. Cependant, le peu d’or trouvé a rendu l’entreprise peu rentable.51

Finalement l’histoire de l’or en Beauce en a déçu plusieurs. À l’exception des frères Poulin, peu de gens ont réussi à faire fortune dans les mines beauceronnes. Cependant, il ne faut pas oublier les côtés positifs de ces ruées vers l’or: la venue en Beauce de plusieurs étrangers et la création d’emplois.

La Beauce industrielle (1921 à aujourd’hui)

À partir de 1921, ce fut le passage de la Beauce agricole à la Beauce industrielle. Plusieurs commerces et services ont vu le jour. De 1921 au début des années 1960, plusieurs manufactures s’ouvrirent. Celles-ci touchaient les secteurs du bois, du textile, du cuir et de l’alimentation. La période de 1961 à aujourd’hui a été marquée par la transformation des matières en produits finis.52 Par exemple, on achetait des planches pour les transformer en chaises. À partir de ce moment, l’esprit d’entreprise beauceron a été reconnu.

La Beauce: le royaume de la petite et moyenne entreprise

Aujourd’hui, la Beauce et les Beaucerons sont souvent cités comme un exemple de réussite économique. Voici quelques qualificatifs employés pour décrire la région: «Le miracle économique beauceron – La Beauce, une région qui invente ses propres solutions – Une région industrielle – Les Beaucerons, des gens d’initiative exceptionnels – Le dynamisme beauceron…»53

Les petits gâteaux Vachon

L’entreprise de fabrication de petits gâteaux Vachon a vu le jour à Sainte-Marie en 1923. Arcade Vachon et son épouse Rose-Anna Giroux ont acheté une petite boulangerie. À cette époque, Rose-Anna préparait le pain et Arcade s’occupait de le vendre dans Sainte-Marie et les environs. C’était à l’aide de son cheval qu’il effectuait ses livraisons. En 1927, les Vachon ajoutaient la fabrication de pâtisseries à leur entreprise.54 Les petits gâteaux Vachon sont vite devenus populaires. Lentement, leurs enfants se joignaient à eux et les aidaient à développer le commerce. Celui-ci est devenu une entreprise familiale.

Devant le succès grandissant de leurs pâtisseries, l’entreprise a dû s’agrandir à plusieurs reprises. En 1939, les premiers gâteaux Jos-Louis apparurent sur le marché. Ils ont été nommés ainsi en l’honneur de deux des fils du couple Vachon: Joseph et Louis.55 Au fil des ans, l’entreprise a offert de nouveaux produits et a étendu son territoire de vente à tout le Québec.

Aujourd’hui, l’entreprise fabrique chaque jour plus de 2 millions de petits gâteaux, ce qui représente environ 520 millions de gâteaux produits par année.56 Le succès de cette entreprise familiale fait la fierté des Beaucerons.

Elle est un modèle de réussite. En effet, qui n’a jamais goûté à l’un de ces fameux petits gâteaux Vachon?

L’industrie textile

Les Beaucerons étaient aussi présents dans l’industrie du vêtement. Au cours du 20e siècle, plusieurs manufactures ont fait leur apparition. Certaines de ces entreprises travaillaient au niveau du textile brut alors que d’autres se consacraient plutôt à la confection finale des vêtements. Nous pouvions retrouver ces entreprises dans plusieurs villes et villages beaucerons.

La plus importante compagnie de textile était la St. Georges Woolen Mills. Elle a été fondée en 1928 et était située à Saint-Georges. Elle se consacrait à la fabrication de tissus en laine. En 1944, avec ses 300 ouvriers, elle devenait le plus important employeur de Saint-Georges. Cette usine était l’un des plus anciens établissements industriels de la région.57

La chaussure

La Beauce fut l’une des premières régions rurales du Québec à développer l’industrie de la chaussure. De 1927 à 1935, on pouvait trouver une usine de chaussures dans chaque ville beauceronne. Les cinq principales manufactures se sont installées à Sainte-Marie, Vallée-Jonction, St-Joseph, Beauceville et Saint-Georges.

C’est à Sainte-Marie, en 1926, que la première usine de chaussures a ouvert ses portes. Elle s’appelait la Regina Shoe. Au milieu des années 1930, elle embauchait jusqu’à 500 ouvriers. Elle est devenue la plus importante usine de chaussures de la province de Québec et l’une des plus grandes au Canada.58

Le développement des villes

Au cours du 20e siècle, on vit la naissance de la Beauce industrielle. Tout le long de la Rivière Chaudière, des entreprises se sont installées, créant ainsi bon nombre d’emplois. Les villes devenaient plus attrayantes pour les gens cherchant à s’établir. En augmentant le nombre d’emplois disponibles, la population des localités situées le long de la Chaudière s’est accrue considérablement. Les villes de Sainte-Marie, Saint-Joseph, Beauceville et Saint-Georges sont devenues des centres importants de l’économie beauceronne.

La ville de Saint-Georges a connu au 20e siècle une croissance remarquable. Elle tirait profit de l’installation de commerces et est devenue la ville beauceronne la plus peuplée. Au début des années 1950, elle comptait 5400 habitants. Au niveau industriel, il y avait 21 manufactures et 128 magasins. On y retrouvait trois succursales bancaires et quelques hôtels. Plusieurs professions y étaient pratiquées. On retrouvait à ce moment une dizaine de médecins, trois avocats et quatre notaires.59

Institutions et société

L’éducation

Aujourd’hui, nous avons au Québec un système scolaire bien organisé. À l’aide de taxes et d’impôts, le gouvernement s’occupe de collecter de l’argent pour ensuite le redistribuer dans différents ministères dont le ministère de l’Éducation. Ce ministère est responsable de la gestion de tout le système scolaire. Celui-ci s’occupe de transférer de l’argent aux commissions scolaires qui à leur tour s’engagent à employer des professeurs et à payer pour un établissement. Le système scolaire n’a pas toujours été ainsi organisé.

Au 18e siècle, la population de la Beauce était peu nombreuse; ainsi, en 1762, on ne comptait que 730 habitants.60 À cause du climat et du mauvais état des routes, il était pénible pour les enfants de se déplacer. La majorité des habitants vivaient dans la pauvreté et il était difficile de trouver des instituteurs. Cette situation a nui à l’établissement d’écoles en Beauce. L’éducation était à ce moment un luxe que seules les familles riches pouvaient s’offrir, car on devait faire venir un instituteur de la ville. Avant 1800, il n’y avait pas d’écoles dans la Beauce.

Ce sont les curés qui devaient s’occuper eux-mêmes de l’enseignement. Ils donnaient, dans leur presbytère, quelques cours de lecture, d’écriture, de calcul et surtout de catéchisme pour préparer les enfants à leur première communion. La famille jouait également un rôle dans l’éducation. En effet, c’était souvent les mères de famille qui transmettaient à leurs enfants les connaissances qu’elles avaient elles-mêmes apprises.61

La première école est apparue à Sainte-Marie en 1814. Le premier maître de l’école enseignait dans sa résidence 4 heures par jour. Les matières enseignées étaient le français, le latin et l’anglais.62 Dans les années 1820, d’autres écoles ont fait leur apparition mais peu d’enfants les fréquentaient. Plusieurs familles étaient encore trop pauvres, elles ne pouvaient dépenser d’argent pour l’éducation. En effet, même si «l’instruction est gratuite, la construction et l’entretien des maisons d’école demeurent à la charge des habitants»63.

En 1824, une loi a été votée. Cette loi permettait aux fabriques de contribuer à l’établissement et à l’entretien des écoles en leur donnant un quart de leurs revenus annuels. La gestion des écoles se faisait par les fabriques.

En 1829, une autre loi a été votée. Elle donnait au Parlement l’autorité dans le domaine de l’éducation. Dans chaque comté, les députés s’occupaient de distribuer l’argent nécessaire au fonctionnement des écoles. À partir de ce moment, l’école devenait accessible à tous les enfants car les plus pauvres étaient instruits gratuitement. Entre 1831 et 1836, le nombre d’écoles à Sainte-Marie est passé de 8 à 35. Malheureusement, cette loi a été abolie en 1836 et plusieurs écoles ont dû fermer leurs portes.

En 1841, on assistait à la mise en place de notre premier système d’instruction publique. Chaque district municipal était responsable de récolter les taxes et de les redistribuer aux différentes écoles. On retrouvait des commissaires, élus par le peuple, qui s’occupaient d’engager les instituteurs, d’adopter les programmes d’études et les manuels scolaires.64

«En 1846, la taxe scolaire redevint obligatoire dans le but d’inciter les parents à envoyer leurs enfants à l’école»65. Cette taxe imposée a provoqué une vive réaction chez la plupart des gens. Bon nombre de parents préféraient garder leurs enfants à la maison plutôt que de payer cette taxe. Plusieurs écoles ont fermé leurs portes. À Saint-François (Beauceville), des personnes sont même allées jusqu’à mettre le feu aux écoles. Les autorités ont dû non seulement éteindre les incendies dans les écoles mais aussi la colère des Beaucerons. C’était la «guerre des éteignoirs»66. Il a fallu attendre 1851 avant que la situation revienne à la normale. Les premiers inspecteurs d’écoles ont été nommés et le nombre d’écoles a augmenté lentement.

Au fil des ans sont apparues de nombreuses petites écoles de rang fréquentées par les garçons et les filles. Dans les villages, on a plutôt assisté à la construction de couvents pour l’éducation des filles et des collèges pour les garçons.

 

[Voir l’image pleine grandeur] Petite école de rang fréquentée par les garçons et les filles.

Les filles pouvaient étudier l’enseignement ménager. Le système scolaire préparait très rapidement les jeunes filles à leur futur rôle de mère et d’épouse.67

En 1943, une loi rendait obligatoire la fréquentation des écoles. Le nombre d’étudiants a augmenté et de nouvelles écoles ont dû être construites. Ce système d’éducation a perduré jusque dans les années 1960.68

À partir de ce moment, on a pris de plus en plus conscience de l’importance de l’instruction pour l’avenir. Les filles, comme les garçons, avaient besoin d’une formation adaptée à la société québécoise de l’époque. Des polyvalentes et des cégeps ont fait leur apparition.

La médecine

Au début du 18e siècle, les Beaucerons n’avaient pas de médecins ni de services de santé. Lorsqu’ils étaient malades, les colons avaient donc deux choix: aller se faire soigner à Québec, ou compter sur leur propre savoir en médecine. Cette situation a laissé la place à une médecine populaire.69

La médecine consistait pour la majorité des colons à tenter de se guérir soi-même à l’aide de différents remèdes naturels faits à partir d’arbres, de plantes, de fleurs, de fruits… Selon les dires de l’époque, «des branches de bleuets ébouillantées guérissaient le diabète»70. Pour la grande majorité des maladies, il suffisait de se préparer la tisane adéquate et le tour était joué! Pour enlever le mal d’estomac, quoi de mieux que de mâcher de la gomme d’épinette jaune! Même le sirop d’érable avait, paraît-il, ses vertus pour soigner la coqueluche: «Boire de l’huile électrique mélangée avec une cuillerée à table de sirop d’érable»71.

Les colons se servaient également de divers produits d’origine animale pour se soigner. Voici quelques exemples de pratiques médicales populaires que l’on retrouvait dans la Beauce:

  • «Si on se pique sur un clou, on doit se mettre une couenne de lard pour faire sortir le méchant»72.
  • Il était aussi conseillé de «boire du lait de jument pour guérir la coqueluche»73.

Heureusement pour les cœurs sensibles, les exemples choisis sont parmi les moins dégoûtants. La lecture de certaines pratiques pourrait même provoquer des haut-le-cœur.

On retrouvait certains «spécialistes» en Beauce. Il y avait des rebouteux qui étaient des spécialistes de l’ossature et qui s’occupaient de soigner différentes fractures. Il y avait également des «ramancheurs» qui travaillaient au niveau de la remise en place des os, des muscles, des tendons et des ligaments. Les «ramancheurs» étaient très populaires en Beauce. Selon la croyance populaire, ils étaient dans la plupart des cas le septième enfant d’une famille, ce qui leur donnait des pouvoirs spéciaux pour guérir. On disait même que ces personnes portaient une tache de naissance qui leur donnait ce don dès leur venue au monde. Ensuite, ces pouvoirs se transmettaient de génération en génération.74

D’autres pratiques de médecine avaient lieu en Beauce. Celles-ci pourraient ressembler étrangement à de la sorcellerie. En effet, certains Beaucerons faisaient appel à des individus dotés de pouvoirs afin qu’ils les guérissent. Ces individus provenaient du même milieu qu’eux, donc ils avaient les mêmes origines et parlaient la même langue. Les gens malades leur portaient une grande confiance et croyaient qu’ils pouvaient réellement les soigner.

Certains individus avaient, paraît-il, le pouvoir d’arrêter l’écoulement du sang ou les maux de dents: «selon la croyance populaire, ils sont initiés grâce à quelques formules rituelles dont ils ne peuvent révéler la teneur sous peine de perdre leurs dons»75. Cette croyance est encore présente aujourd’hui. Autrefois, il fallait également faire attention aux individus qui avaient des pouvoirs maléfiques. Ceux-ci avaient la capacité de jeter des sorts qui pouvaient nuire à la santé. Il ne fallait surtout pas se faire haïr d’une personne ayant ces fameux pouvoirs!

Les Beaucerons ont également eu recours à différents saints du paradis pour les guérir. Selon les dires de certaines personnes, il fallait invoquer sainte Apolline dans ses prières pour arrêter un mal de dents. Il semblerait qu’elle serait morte d’un mal de dents76.

À partir de 1762, des médecins et des chirurgiens sont venus s’installer en Beauce. Cependant, ceux-ci étaient peu nombreux. Dans ce temps-là, les connaissances en médecine ne représentaient pas celles d’aujourd’hui. Donc, souvent, peu importe le malaise, les médecins prescrivaient aussitôt une purgation ou une saignée de façon à rétablir l’équilibre interne du corps. En fait, la saignée était employée dans la majorité des maladies et elle était même prescrite à titre préventif.77 Elle consistait à enlever au patient un peu de sang après avoir fait une petite incision dans une veine du bras.

À partir du 19e siècle, le nombre de médecins a augmenté lentement. Mais il a fallu attendre la fin de ce siècle pour que les paroisses les plus peuplées puissent avoir les services d’un médecin. Donc, pour obtenir des soins, les colons devaient se rendre à Sainte-Marie, Saint-Joseph, Beauceville ou Saint-Georges.78

À partir du 20e siècle, les services de soins de santé sont plus présents et surtout mieux organisés. Progressivement, les établissements qui étaient gérés par les religieuses sont devenus les hôpitaux que l’on connaît aujourd’hui.

III- Notre folklore

Les cabanes à sucre

♪♫♪♫ «En caravane, allons à la cabane,
on n’est jamais de trop pour goûter au sirop…» ♪♫♪♫

 

[Voir l’image pleine grandeur] Une cabane à sucre.

Cet air bien connu représente l’un des éléments du paysage beauceron: les cabanes à sucre. Les «parties de sucre» ont été et sont encore pour bon nombre de Beaucerons une tradition. Les expressions «courir les érables» et «tremper la palette» font encore aujourd’hui partie de notre langage. Mais d’où nous viennent les méthodes de transformation de l’eau d’érable?

Nous savons qu’elles sont enseignées de génération en génération depuis bien longtemps. Mais connaissez-vous leur origine?

Selon la tradition, ce seraient les Amérindiens qui auraient découvert le procédé de fabrication du sucre d’érable. Ceux-ci utilisaient des récipients d’écorce pour recueillir l’eau des érables. Ensuite, ils faisaient bouillir l’eau à l’aide de pierres rougies au feu. Ce procédé a été ensuite perfectionné par les Européens venus s’installer en Nouvelle-France. Ils se servaient de chaudrons pour leur permettre d’atteindre le niveau de chaleur désiré pour transformer l’eau en sirop79.

Les cabanes à sucre ont permis la création de divers objets tels que les moules à sucre. Ceux-ci avaient d’ailleurs plus d’une fonction. Les hommes les sculptaient avec différents motifs ou formes. Saviez-vous que les hommes s’en servaient même pour séduire leur dame? En effet, ils utilisaient des moules en forme de cœur et offraient le sucre d’érable ainsi obtenu à la demoiselle tant désirée.80

Le pont couvert

La rivière Chaudière, dans son parcours, passe en plein cœur du village de Notre-Dame-des-Pins, séparant ainsi ses habitants. Depuis la création de ce village, les gens ont souhaité la construction d’un pont pour réunir ses deux rives.

 

[Voir l’image pleine grandeur] Un pont.

Il a pourtant fallu que ses habitants attendent 1927 avant que ne soit érigé un premier pont couvert fait entièrement de bois. Malheureusement, le printemps suivant sa construction, les glaces de la Chaudière ont entraîné son effondrement lors d’une débâcle. En 1929, un deuxième pont couvert a été construit. Celui-ci a servi pendant 40 ans avant d’être remplacé par un pont de béton en 1969. L’ancien pont a été conservé et est, encore aujourd’hui, le pont couvert le plus long au Québec. Il est maintenant classé monument historique et il représente un élément particulier du décor beauceron81.

Les inondations et les débâcles de la rivière Chaudière

La rivière Chaudière prend sa principale source dans le lac Mégantic et coule vers le fleuve Saint-Laurent sur une distance de 200 km. Plusieurs rivières se jettent dans la Chaudière dont la rivière Famine et la rivière Pozer que l’on retrouve à Saint-Georges, et la rivière Gilbert qui coule à Notre-Dame-des-Pins.82

 

[Voir l’image pleine grandeur] Gens qui voyagent dans des chaloupes dans les rues inondées.

Ce qui est particulier avec la Chaudière, ce sont les nombreuses inondations qu’elle occasionne. En effet, qui n’a jamais entendu parler des fameuses débâcles beauceronnes? Ces moments où la rivière déborde et transporte avec elle les glaces qui, sur leur passage, détruisent les maisons, les bâtisses et les ponts. Plusieurs causes sont à l’origine de ce phénomène.

Premièrement, la Chaudière coule du sud vers le nord. Lors d’un dégel, le cours de l’eau est freiné par les glaces qui sont encore présentes plus au nord, ce qui fait augmenter le niveau de la rivière et cause des inondations. De plus, entre Saint-Georges et Scott-Jonction, la pente de la rivière est moins prononcée, ce qui provoque le débordement fréquent des eaux à Beauceville, Saint-Joseph, Vallée-Jonction et Sainte-Marie.

De plus, dès l’ouverture de la Beauce, les gens se sont installés de part et d’autre de la rivière Chaudière. Ils pouvaient de cette façon avoir un accès plus facile à l’eau. Les gens s’achetaient un terrain et le déboisaient pour y construire leur maison. Comme il y avait moins d’arbres pour freiner l’écoulement rapide des eaux, le niveau de la Chaudière augmentait plus rapidement. Au fil des ans, le nombre de constructions sur les rives de la rivière a augmenté. En serrant la rivière d’un peu trop près, les Beaucerons ont contribué à ses débordements.83

Plusieurs débâcles sont restées gravées dans la mémoire collective des Beaucerons. Il y a eu d’importantes débâcles en 1885 et en 1896. Les journaux de l’époque rapportaient que des maisons ont été déplacées et plusieurs ponts emportés. Il y eut une autre importante débâcle printanière en 1912, décrite ainsi par le journal local: «La rivière Chaudière, dans une débâcle encore plus considérable que celles de 1885 et de 1896, balaie tout sur son passage, causant des milliers et des milliers de piastres de dommage»84. À partir de ce moment, les Beaucerons ont tenté de sensibiliser le gouvernement en lui demandant de trouver une solution aux débordements de la Chaudière. Pourtant, aucun moyen n’a été pris.

La plupart des inondations surviennent au printemps lorsqu’il y a un dégel. Cependant, à l’été 1917, à la suite de fortes pluies, deux nouvelles inondations survenaient en juin et juillet. D’énormes dommages ont été causés aux maisons, aux commerces et aux routes des villages. Une autre débâcle est survenue en 1928.

En décembre 1957, un dégel hivernal a provoqué d’autres inondations. À Beauceville, on estimait les dégâts à 2 millions de dollars. On a demandé de l’aide au gouvernement afin d’aider les sinistrés. Les Beaucerons ne souhaitaient plus de beaux discours mais des solutions. Le Comité préventif des inondations de la rivière Chaudière a été fondé par 150 délégués provenant de 7 municipalités de la région. Ceux-ci avaient pour mandat de préparer un rapport afin de démontrer au gouvernement l’urgence de la situation.85

À partir des années 1960, le gouvernement du Québec a pris des mesures pour aider la Beauce. Le 17 décembre 1967, le barrage Sartigan a été construit à Saint-Georges. Dans les années qui ont suivi, ce barrage a semblé bien jouer son rôle car les réclamations pour inondation étaient moins élevées. Le journal régional a vanté les mérites du barrage: «Il y a quelques années, il était fréquent de voir la rivière Chaudière envahir nos routes quand venait le printemps. Mais depuis qu’on a aménagé un barrage pour «dompter» la rivière, ses colères se font beaucoup moins violentes»86.

Cependant, au printemps 1986, alors que la température a augmenté rapidement, le mouvement des glaces a entraîné d’importantes inondations à Beauceville et à Saint-Georges.

En 1991, la situation s’est répétée. Beauceville a été une fois de plus touchée par le phénomène. On estimait les dommages à environ 10 millions de dollars. On a qualifié l’événement de véritable désastre. Quelques jours plus tard, c’était au tour de Sainte-Marie de vivre la débâcle.87

Aujourd’hui, les inondations printanières sont encore présentes en Beauce. Tout porte à croire que celles-ci continueront de faire partie des particularités de la Beauce, de son folklore.

Les contes et légendes

Plusieurs contes et légendes font partie du folklore beauceron. Bien que ces récits ne proviennent pas tous de la région, ils sont encore présents dans la mémoire des gens. Les Beaucerons aiment bien raconter des histoires, mais surtout, se conter des peurs.

Selon certains, le diable se serait manifesté à plusieurs reprises en Beauce et sous diverses formes. Il pouvait prendre l’apparence d’un animal pour faire peur aux gens. Ses grands yeux jaunes en effrayaient plus d’un. Le diable pouvait également se transformer en beau danseur pour enlever les jeunes filles lors des soirées dansantes.

Voici une légende bien connue en Beauce, celle du Braillard des Fermes.

«Je vais vous raconter un petit fait qui s’est passé il y a nombre d’années sur la route des Fermes. Il y avait un cultivateur dans ce temps-là qui avait eu le malheur de déranger une borne. Après sa mort, son créateur lui avait dit qu’il fallait qu’il revienne placer la borne où elle était. Il fallait qu’il vienne le demander à quelqu’un. Les gens qui passaient par la route qui descendait entendaient cette voix-là qui disait: «Où que je vais la mettre? Où que je vais la mettre?» Ils ne savaient pas ce que c’était, ça; ils pensaient que c’étaient des oiseaux qui parlaient, que c’étaient des perroquets. Ça répétait toujours la même chose: «Où que je vais la mettre?» Toujours, un bon samedi, c’était un soir, il faisait noir dans une tempête, et un homme descendait. Il avait pris un peu de caribou. C’était la boisson du temps. Il entend cette voix-là, et il arrête. Il dit: «Maudit! mets-la où tu l’as prise.» Ça n’a pas pris cinq minutes, un monsieur est arrivé, et qui venait le remercier; il venait d’être délivré. Il a raconté son histoire, et il était bien content.»88

Au début du 20e siècle, le mot sorcellerie faisait partie du vocabulaire des Beaucerons. Ceux-ci croyaient que la sorcellerie pourrait leur obtenir des faveurs. Il y avait deux catégories de sorciers: les bons et les mauvais. Les bons sorciers s’occupaient de guérir les malades ou d’arrêter un incendie. Ceux-ci contribuaient à améliorer la vie des gens. Par contre, il y avait aussi les mauvais sorciers, appelés «jeteux» de sorts. Ils causaient du tort aux hommes et même aux animaux. Les Beaucerons se servaient alors de diverses techniques pour conjurer le mauvais sort.

En discutant avec des personnes d’un certain âge, il est encore possible de connaître les sorts que les gens se jetaient à l’époque en Beauce. En voici quelques exemples:

  • Lorsqu’un cochon refusait de manger pendant plusieurs jours, il s’était sûrement fait jeter un mauvais sort. Le propriétaire devait alors faire chauffer une lame de couteau jusqu’à ce qu’elle devienne rouge et aller marquer le cochon avec celle-ci. De cette façon, le sort se retournait contre la personne qui l’avait au départ lancé. Le cochon se sentait mieux et recommençait à manger.
  • Lorsque les gens fabriquaient du savon et qu’ils n’arrivaient pas à le faire figer, ils accusaient automatiquement le mauvais sort. Ils faisaient alors «rougir» des aiguilles et les jetaient dans le savon. Le mauvais sort étant rompu, les gens obtenaient leur savon.
  • Lorsqu’un habitant se faisait voler une hache, il n’avait qu’à jeter un mauvais sort au voleur. Quelques jours après, le voleur se blessait avec la hache et le propriétaire connaissait automatiquement le responsable du crime.

À l’intérieur d’un village, certains conflits se produisaient entre les gens. Lorsqu’il arrivait malheur à un habitant, celui-ci blâmait automatiquement le voisin qu’il n’aimait pas.

  • Lorsque les briques d’une cheminée, en tombant à l’intérieur de celle-ci, boucanaient toute la maison, le propriétaire cherchait qui en était responsable dans le village. Il était sûr qu’il s’était fait jeter un mauvais sort.

Il y avait aussi le Petit Albert qui était, selon certains, un livre de sorcellerie, ou plutôt de magie noire. Avec ce livre, il était possible de faire un pacte avec le diable. Plusieurs en avaient peur.

Selon les croyances de l’époque, le septième garçon consécutif dans une famille recevait des dons divins particuliers. Il était très important pour le curé de lui retirer ses dons lors de son baptême, sinon l’enfant gardait ses dons particuliers. Il pouvait alors s’en servir pour faire le bien mais aussi pour répandre le mal autour de lui.

Le folklore beauceron est rempli de récits de toutes sortes. «Le caractère longtemps rural de la Beauce a gardé ces histoires qui ne veulent plus s’envoler de nos mémoires tellement elles sont belles à entendre»89.

Les quêteux

Autrefois, il existait une catégorie de gens qui n’avaient pas de domicile fixe. Ceux-ci se promenaient avec leur gros baluchon sur le dos, de village en village, de maison en maison. On les surnommait les quêteux.

À chaque année, à peu près à la même date, le quêteux frappait à la porte de la même maison que l’année précédente. On ne le voyait qu’une fois par année. Le quêteux suivait un itinéraire bien précis. Il se rendait dans les maisons pour donner aux habitants les nouvelles des villages voisins en échange de leur hospitalité. Certains quêteux offraient de rendre de petits services en échange de l’hébergement et d’un repas, mais la plupart demandaient l’aumône pour «l’amour du bon Dieu». Les Beaucerons acceptaient toujours de les héberger. C’est pourquoi on retrouvait dans la plupart des maisons beauceronnes, le fameux «banc de quêteux»90.

Le banc de quêteux était fait de bois et on le construisait plus large qu’un banc régulier. Ce banc servait de lit au quêteux. Selon certains, les gens faisaient dormir leur invité sur un banc de bois car ils avaient peur qu’il soit porteur de poux. Donc, pour éviter d’attraper des poux, les gens ne prêtaient pas leur lit au quêteux.

Les Beaucerons pouvaient accepter de loger les quêteux pour plusieurs raisons. Certains le faisaient par charité ou par grandeur d’âme. Mais d’autres craignaient qu’en refusant d’abriter un quêteux, ils seraient victimes d’un mauvais sort. Certaines personnes croyaient même que le quêteux avait des pouvoirs spéciaux et si on le mettait en colère, il pourrait se venger.91

Les Jarrets noirs

Qui n’a jamais entendu parler des fameux «Jarrets noirs»? La majorité des Québécois savent que ce surnom est attribué aux Beaucerons. Cependant, ils n’en connaissent pas toujours la raison. Quel est le lien entre le Beauceron et les «Jarrets noirs»?

Lors de l’ouverture des premières seigneuries en Beauce, il y avait peu ou pas de marchands. Donc, pour faire le commerce ou pour échanger leurs produits, les Beaucerons devaient se rendre à Québec. À cette époque, il existait une route entre la Beauce et Québec. Mais cette route n’était pas celle que l’on connaît aujourd’hui, elle était plutôt un chemin de charrette.

À Saint-Henri, il y avait des basses terres qui étaient parsemées de tourbières et de terre noire. Au printemps, avec le dégel et les pluies, ces terres devenaient de véritables bourbiers.92 Lorsque les Beaucerons arrivaient à Saint-Henri, leurs chevaux s’enlisaient dans la boue. Les pattes de leurs chevaux devenaient à moitié couvertes de boue, ils en avaient jusqu’aux «jarrets». Cette situation pouvait également s’appliquer aux hommes. Lorsque les chevaux étaient coincés dans la boue, les hommes, en déprenant leurs chevaux de leur mauvaise posture, se retrouvaient eux aussi, les jambes couvertes de boue.

Lorsque les Beaucerons arrivaient à Québec pour faire leur commerce, il était facile pour les gens de la ville de les identifier car ils avaient, ainsi que leurs chevaux, les «jarrets tout noirs».

Cette image du Beauceron qui arrive en ville avec ses chevaux couverts de terre est particulière à notre région. Les gens de l’époque ont commencé à surnommer les Beaucerons les «Jarrets noirs» et ce surnom est resté gravé dans nos mémoires.

Le parler beauceron

On ne peut parler de la Beauce et passer sous silence le fameux langage beauceron. Quel Beauceron n’a jamais, à un moment ou un autre, prononcé quelques mots en «joual»? Même si les accents beaucerons tendent à s’estomper avec les nouvelles générations, il reste qu’ils font partie de leurs particularités, de leur folklore.

La prononciation des mots varie également selon le positionnement géographique des villages. En effet, l’accent est différent selon qu’on habite les localités au nord, près de Québec, ou celles plus au sud, près des États-Unis.

Voici quelques exemples du parler beauceron. Certains mots cités ne prennent peut-être pas leur origine en Beauce, mais ils sont utilisés dans la région. D’autres mots deviennent particuliers par leur prononciation.

  • Dans la Beauce, on retrouve des djêpes (guêpes), des ldjèvres (lièvres), des djiboux (hiboux), des chevreux (chevreuils) pis des frémilles (fourmis). On va à la pêche à la parchaude (perche).
  • On scie le bois avec un sciotte ou un boxa (scies à main).
  • Les Beaucerons sont des patenteux (bricoleurs), ils chedèvrent (fabriquent) toutes sortes d’objets.
  • Les Beaucerons ont parfois mal au reinquier (reins).
  • Parmi les vêtements, on retrouve la fameuse soute-à-panneau (sous-vêtement masculin) et les bottes à douilles (bottes hautes et lacées dans des œillets, sorte de douilles).
  • On abat des âbes (arbres).
  • Les Beaucerons vont cri (chercher) les animaux.
  • Il s’est éjarré (tomber en s’écartant les jambes) en tombant sur le ganoué (pont donnant accès à une grange ou un réservoir de cabane à sucre).93

La majorité de ces mots ou expressions ont tendance à disparaître au fil des générations. Certains Beaucerons continuent de les utiliser, peut-être par habitude, peut-être pour conserver leurs racines ou leurs particularités régionales. Cependant, ce qui est sûr, si vous rencontrez un Beauceron en colère, son parler coloré refera probablement surface. «Quand les émotions s’en mêlent, le bon Beauceron ressort»94.

Bibliographie

Ouvrages généraux

Brown, Craig. Histoire générale du Canada. Québec, Les Éditions du Boréal, 1990. 694 pages.

Dickinson, John A. et Brian YOUNG. Brève histoire socio-économique du Québec. Sillery, Les Éditions du Septentrion, 1992. 382 pages.

L’Encyclopédie Canada 2000. Montréal, Les Éditions internationales Alain Stanké, 1999. 2639 pages.

Poirier, Claude et al. Dictionnaire historique du français québécois. Sainte-Foy, Les Presses de l’Université Laval, 1998. 640 pages.

Ouvrages spécialisés

Bélanger, France et al. La Beauce et les Beaucerons. Portraits d’une région 1737-1987. Saint-Joseph-de-Beauce, La Société du patrimoine des Beaucerons, 1988. 381 pages.

Commission de toponymie. Noms et lieux du Québec. Dictionnaire illustré. Québec, Gouvernement du Québec, 1996. 925 pages.

Courville, Serge et al. Histoire de Beauce-Etchemin-Amiante. Sainte-Foy, Les Éditions de l’IQRC, 2003. 1047 pages.

Dupont, Jean-Claude. Le légendaire de la Beauce. Montréal, Les Éditions Leméac, 1978. 197 pages.

Dupont, Jean-Claude. Les Amérindiens au Québec. Culture matérielle. Québec, Les Éditions J.-C. Dupont, 1993. 63 pages.

Ferron, Madeleine. Les Beaucerons ces insoumis. Petite histoire de la Beauce. 1735-1867. Montréal, Éditions Hurtubise HMH, 1974. 174 pages.

Ferron, Madeleine et Robert Cliche. Quand le peuple fait la loi. La loi populaire à Saint-Joseph de Beauce. Montréal, Éditions Hurtubise HMH, 1972. 157 pages.

Lorent, Maurice. Le parler populaire beauceron. Montréal, Les Éditions Leméac, 1977. 225 pages.

Obalski, J. Or dans la province de Québec Canada. Québec, Département de la Colonisation et des Mines, juin 1898. 84 [1] p. carte.

Crédits

La réalisation de ce document est rendue possible grâce à la contribution financière du Secrétariat national à l’alphabétisation dans le cadre du programme «Initiatives fédérales-provinciales conjointes en matière d’alphabétisation».

Rédaction
Marjorie Nadeau, formatrice
Alphare, Centre d’alphabétisation populaire de Beauce
Point de service, municipalité de La Guadeloupe

Mise en pages
Marjorie Nadeau
Danie Mathieu, Centre de photocopie couleur laser Danie Mathieu, La Guadeloupe

Les personnes suivantes ont collaboré à la réalisation de ce livre
Céline Leclerc, formatrice
Marcel Glaude, coordonnateur
Alphare, Centre d’alphabétisation populaire de Beauce
St-Georges de Beauce (418) 226-4111

Illustrations
Nancy Campbell

Lecture et révision linguistique
Maurice Lorent
Vice-président du conseil d’administration du Centre d’alphabétisation

Impression
Danie Mathieu, Centre de photocopie couleur laser Danie Mathieu, La Guadeloupe

Publié par
Alphare

 

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  • 1 France Bélanger et al., La Beauce et les Beaucerons. Portrait d’une région 1737-1987. Saint-Joseph-de-Beauce, La Société du patrimoine des Beaucerons, 1988, p.15.
  • 2 L’Encyclopédie Canada 2000, Montréal, Les Éditions internationales Alain Stanké, 1999, p.220.
  • 3 Madeleine Ferron, Les Beaucerons ces insoumis. Petite histoire de la Beauce 1735-1867. Montréal, Éditions Hurtubise HMH, 1974, pp.53-56.
  • 4 France Bélanger et al., op. cit., p.270.
  • 5 Serge Courville et al. Histoire de Beauce-Etchemin-Amiante. Sainte-Foy, Les Éditions de l’IQRC, 2003, pp.96-100.
  • 6 France Bélanger et al., op. cit., p.17.
  • 7 Serge Courville et al., op. cit., p. 102, p.114
  • 8 France Bélanger et al., op. cit., pp.17-19.
  • 9 Serge Courville et al., op. cit., p.24.
  • 10 Ibid., pp.113-114.
  • 11 France Bélanger et al., op. cit., pp.51-52.
  • 12 Serge Courville et al., op. cit., p.133
  • 13 France Bélanger et al., op. cit., p.19.
  • 14 Ibid., pp.19-20.
  • 15 Ibid., pp.52-53.
  • 16 Ibid., p.23.
  • 17 Serge Courville et al., op. cit., pp.135-136.
  • 18 France Bélanger et al., op. cit., p.268.
  • 19 Ibid.
  • 20 Ibid.
  • 21 Ibid., p.270.
  • 22 Ibid., p.271.
  • 23 Commission de toponymie, Noms et lieux du Québec. Dictionnaire illustré. Québec, Gouvernement du Québec, 1996, p.668.
  • 24 France Bélanger et al., op. cit., p.271.
  • 25 Ibid., pp.262-264.
  • 26 Ibid., p.263.
  • 27 Serge Courville et al., op. cit., p.202.
  • 28 Ibid., p.204.
  • 29 Ibid., p.204-205.
  • 30 John A. Dickinson et Brian Young, Brève histoire socio-économique du Québec. Sillery, Les Éditions du Septentrion, 1992, pp.60-65.
  • 31 France Bélanger et al., op. cit., pp.28-29.
  • 32 Serge Courville et al., op. cit., pp.169-172.
  • 33 Serge Courville et al., op. cit., p.316.
  • 34 Ibid., pp.347-349.
  • 35 France Bélanger et al., op. cit., p.29.
  • 36 Ibid., p.60.
  • 37 Ibid., p.32.
  • 38 Ibid., p.62.
  • 39 Serge Courville et al., op. cit., p.209.
  • 40 Ibid., p.260.
  • 41 Ibid., pp.257-258.
  • 42 France Bélanger et al., op. cit., pp. 62 et 64.
  • 43 Ibid., p.62.
  • 44 Ibid., p.66.
  • 45 Ibid.
  • 46 Ibid., pp.-66-68.
  • 47 Ibid., pp.68-69.
  • 48 J. Obalski, Or dans la province de Québec Canada, Québec, Département de la Colonisation et des Mines, juin 1898, pp.73-74.
  • 49 France Bélanger et al., op. cit., pp.69-70.
  • 50 Ibid., p.70.
  • 51 Ibid., p.71.
  • 52 Ibid., p.74.
  • 53 Ibid., p.49.
  • 54 Serge Courville et al., op. cit., p.407.
  • 55 Ibid., p.408.
  • 56 Ibid., p.407.
  • 57 Ibid., p.502.
  • 58 France Bélanger et al., op. cit., p.99.
  • 59 Serge Courville et al., op. cit., p.762.
  • 60 France Bélanger et al., op. cit., p.30.
  • 61 Ibid., pp.202-203.
  • 62 Serge Courville et al., op. cit., p.286.
  • 63 France Bélanger et al., op. cit., p.203.
  • 64 Ibid., pp.203-205.
  • 65 Ibid., p.204.
  • 66 Madeleine Ferron, Les Beaucerons ces insoumis. Petite histoire de la Beauce 1735-1867, Montréal, Éditions Hurtubise HMH, 1974, p.164.
  • 67 France Bélanger et al., op. cit., p.214.
  • 68 Serge Courville et al., op. cit., pp.532-533.
  • 69 France Bélanger et al., op. cit., p.235.
  • 70 Ibid., p.236, (Tiré du Fonds Christine Audet. Inf. Émiliana Hince, Frampton, 1974)
  • 71 Ibid., p.237, (Tiré du Fonds Johanne Vachon. Inf. Mme Georges-E. Vachon et Mme Placide Vachon, [s.l.], [s.d.].)
  • 72 Ibid., p.238, (Tiré du Fonds Nycolle Roy. Inf. Jean-Marie Roy, Saint-Joseph, 1974)
  • 73 Ibid., p.238, (Tiré du Fonds Nycolle Roy. Inf. Jean-Marie Roy, Saint-Joseph, 1974)
  • 74 Ibid., p.238.
  • 75 Ibid.
  • 76 Ibid. (Tiré du Fonds Lisette Cliche. Inf. Mme Léonidas Cliche, Vallée-Jonction, 1974)
  • 77 Ibid., pp.238-239.
  • 78 Ibid., p.239.
  • 79 Serge Courville et al., op. cit., p.375.
  • 80 France Bélanger et al., op. cit. p.265.
  • 81 Ibid., p.300.
  • 82 Serge Courville et al., op. cit., p.394.
  • 83 France Bélanger et al., op. cit., p.266.
  • 84 Serge Courville et al., op. cit., p.398, (Tiré de L’Éclaireur, «Beauceville est submergée. Pertes énormes», 18 avril 1912.)
  • 85 Ibid., pp.398-402.
  • 86 Ibid., p.403, (Tiré de L’Éclaireur-Progrès, «La Chaudière: comme au bon vieux temps», 21 avril 1982.)
  • 87 Ibid., pp.403-404.
  • 88 Jean-Claude Dupont, Le Légendaire de la Beauce, Montréal, Les Éditions Leméac, 1978, pp.93-94. (Coll. J.C.D., enreg, n° 10-390, M. Louis Gilbert, 66 ans, Saint-Jules.)
  • 89 France Bélanger et al., op.cit., pp.266-267.
  • 90 Madeleine Ferron et Robert Cliche, Quand le peuple fait la loi. La loi populaire à Saint-Joseph de Beauce., Montréal, Éditions Hurtubise HMH, 1972, pp.143-144.
  • 91 Ibid., p.144.
  • 92 Serge Courville et al., op. cit., p.30.
  • 93 Maurice Lorent, Le parler populaire de la Beauce, Montréal, Les Éditions Leméac, 1977.
  • 94 France Bélanger et al., op. cit., p.277.

By René Arbour

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